L'Oiseleur

L’Oiseleur Amour se promène
Lorsque les coteaux sont fleuris,
Fouillant les buissons et les plaines,
Et chaque soir sa cage est pleine
Des petits oiseaux qu’il a pris.

Aussitôt que la nuit s’efface
Il vient, tend avec soin son fil,
Jette la glue de place en place,
Puis sème pour cacher la trace
Quelques grains d’avoine ou de mil.

Il s’embusque au coin d’une haie,
Se couche aux berges des ruisseaux,
Glisse en rampant sous la futaie
De crainte que son pied n’effraie
Les rapides petits oiseaux.

Sous le muguet et la pervenche,
L’enfant aussi cache ses rets
Ou bien sous l’aubépine blanche
Ou tombent comme une avalanche
Linots, pinsons, chardonnerets.

Parfois d’une souple baguette
D’osier vert ou de romarin
Il fait un piège, et puis il guette
Les petits oiseaux en goguette
Qui viennent becqueter son grain.

Etourdi, joyeux et rapide
Bientôt approche un oiselet,
il regarde d’un air candide
S’enhardit, goûte au grain perfide
Et se prend la patte au filet.

Et l’Oiseleur l’Amour l’emmène
Loin des coteaux frais et fleuris
Loin des buissons et de la plaine
Et chaque soir sa cage est pleine
Des petits oiseaux qu’il a pris.

Guy de Maupassant