Cahier de Chansons n°3

(19ème siècle)

appartenant à

Madeleine Prat

š

Commencé et terminé en Juin 1893

Chansons prises dans les cahiers de Me E. Watrin

Table

Le vieux drapeau

Un Nid dans une bombe

La Bergère

Mes Amours

L’orage ou la peureuse

Isnelle

Robert

Une mère à sa fille divorcée

Le premier bal

Viens dans ma nacelle

Madeleine

La place de l’Absent

Les trois idoles

Les serments de ma cousine

Lettre d’une cousine à son cousin

L’oublié

A Victor Hugo

Le secret de Bébé

La folle de la plage

Passera-t-il ? Passera-t-elle ?

Les cloches de Noël

La poitrinaire

Gardez-vous de vieillir

Hommage à un ami le jour de son mariage

Suzette

L’Indienne

Le printemps

Mimi Soleil

La saison des cerises

Les hirondelles

La peur d’aimer

Pedro

Mes amours

Jean le pêcheur

Les bandits de la montagne

Au pays de Mireille

Connais-tu l’amour ?

Le petit soulier

Le sentier

Reviens

Regrets de 20 ans

Une tombe dans les blés

Partez Ernest !

Rappelle-toi

Mes 20 ans

L’âge d’amour

Le printemps des amours

Les corsaires de Venise

Les Hirondelles frileuses

L’aveugle

Les toasts à la Patrie

Belle Patrie te reverrai-je un jour ?

Le mendiant

Une chanson française dans un cabaret d’Alsace

Le baiser des adieux

La voix des fleurs

Ma Jeanne

Le soldat de Marsala

Il faut aimer un jour

J’attends

Mes illusions

Le cimetière du village

Encore un baiser

Les trois fauvettes

Le baptême d’une poupée

Petit Pinson

Vendue !

Viens mon Idole

Le mari règne et ne gouverne pas

Le Rosier blanc

Le billet de retour

Une drôle de rencontre

Il est parti

C’est toi !

L’île des baisers

Le Magenta

Le dernier aveu

Le vieux drapeau

Près d’un chemin de la vieille Lorraine
Silencieux, deux hommes à genoux
Creusent des mains la terre auprès d’un chêne
Et se disaient : « Le retrouverons-nous ?
C’est bien ici que pendant la bataille
Dit l’un des deux nous l’avons enterré
Ami, je sens tout mon cœur qui tressaille
Voici les plis de ce lambeau sacré. »

Refrain

Je te retrouve après deux ans d’absence
En revoyant tes brillantes couleurs
Mes yeux sur toi laissent tomber des pleurs
Mon vieux drapeau (bis) de France.

2ème Couplet

C’était la fin d’un jour sinistre et sombre
Où l’ennemi dans un cercle de fer
Avait vaincu la valeur par le nombre
Où les chemins étaient pavés de chair
En devinant que l’on allait se rendre
Nous avons là du bout de nos fusils
Creusé, mon vieux ne pouvant te défendre
L’humble cercueil d’où mes mains t’ont repris.

Je te retrouve etc.

3ème Couplet

Tu vas flotter au vent de l’espérance
Et dans tes plis la vieille croix d’honneur
Comme autrefois va parler de vaillance
Au régiment sans reproche et sans peur
Comme autrefois, ma superbe bannière,
Tu guideras nos pas vers les canons
Mais chut ! La France a besoin de se taire
Souvenons-nous de ceux que nous pleurons.

Je te retrouve etc.

Un nid dans une bombe

Comme un nid d’oiseaux que l’hiver emporte
Et souille et déchire à chaque buisson
L’on avait détruit la pauvre maison
Une femme en deuil pleurait sur la porte
Serrant dans ses bras un petit garçon
Elle regardait les poutres brisées
Et rêvait sans doute aux heures passées
Au coin du foyer. Dans ses yeux si doux,
Le malheur jetait de sombres pensées
Mais moi je lui dis « Pourquoi pleurez-vous ? » . (bis)

2ème Couplet

Pourquoi pleurez-vous, venez dans la haie
Je vais vous montrer un tableau charmant
Voyez-vous ce nid qui chante gaîment ?
Un oiseau l’a fait, sans que rien l’effraie,
Au fond d’un obus encore fumant
Ce noir instrument de meurtre et de guerre
Est plein de babil, de cris, de lumière
C’est l’espoir de Mai par le ciel béni
L’homme l’a construit pour tuer son être
L’amour maternel en a fait un nid. (bis)

3ème Couplet

Car c’est le bon Dieu qui fait de nos tombes
Sortir au printemps les plus belles fleurs
Lui qui fait germer l’amour dans les fleurs
Lui qui dit : « Enfants, soyez mes colombes
Bâtissez un nid au temps des douleurs »
Suivons le conseil, femme, que t’en semble ?
Elle a dans mes mains, mis sa main qui tremble
Et séché les pleurs de ses yeux si beaux
Nous avons refait la chaumière ensemble
Et nous nous aimons comme deux oiseaux. (bis)

La bergère

J’nons jamais vu de bergères
Qu’en des livres charmants
Serait ce une chimère
J’en demande au val, au champs
Aux champs l’on m’envoie paître
Le vallon reste muet
Florian, ô mon maître
Une bergère s’il vous plait.

2ème Couplet

Là haut, sous la fougère
C’en est une ; approchons
Il pleut, il pleut bergère
Rentre tes blancs moutons
Il pleut, oui, répond-elle
C’est ben facile à voir
Pour faire comme jean Nivelle
Il faut laisser pleuvoir.

3ème Couplet

Permets qu’à ton corsage
Je place ces fleurs des champs
A ta tête ce feuillage
A tes pieds ce ruban
Monsieur tout ça m’honore
Mais j’avions des sabots
Si vous parlez encore
J’vous les casserons sur l’dos.

4ème Couplet

Dans ta blanche chaumière
Quand l’orage va venir
Ta bonne et tendre mère
Voudra te retenir
Ma mère s’moque ben qu’on s’mouille
Elle m’dit, Veux-tu t’en aller
Ou ben j’prends la quenouille
Pour te faire filer.

5ème Couplet

Là-dessus, je m’éloignai d’elle
Me disant en chemin
Si telle était Estelle
Quel est donc Mémorin
Certaines bêtes à litière
Qui font hi han, hi han,
Peindraient mieux une bergère
Que Monsieur Florian.

Mes Amours

Je ne crois pas encourir votre blâme
En vous disant que j’aime éperdument
Aimer d’ailleurs est un besoin de l’âme
Le cœur est faible et succombe aisément (bis)
Oui de l’amour effeuillant la couronne
Je me soumets à ses douces leçons
Et pour ma part que le ciel me pardonne
J’aime d’amour trois fort jolis garçons. (bis)

2ème Couplet

L’un est parfait, teint rosé, frais visage
De grands yeux bleus exprimant la bonté
Et sur son front les douceurs du jeune âge
Qui se traduit par l’amabilité (bis)
Des cheveux blonds encadrent sa figure
Avec cela fines mains pieds mignons
Riche en un mot des dons de la nature
Il est des trois le plus joli garçon. (bis)

3ème Couplet

Un autre est brun, parfois la rêverie
Sur son front pâle laisse un pli soucieux
Mais à ma voix plus de mélancolie
Il me sourit et redevient joyeux (bis)
Quant au troisième, oh !  C’est ma joie intime
Aussi Dieu sait si nous nous chérissons
En aimer trois n’est pas un bien grand crime
Quand il s’agit d’aussi jolis garçons. (bis)

4ème Couplet

Mais voici donc qu’à présent je redoute
La médisance et son funeste effet
Il me faut donc dissiper votre doute
En dévoilant de mon cœur le secret (bis)
Le sentiment dont mon âme est ravie
Est pur et saint et nous le bénissons
Car ceux qui font le bonheur de ma vie
Sont mes enfants, trois amours de garçons. (bis)

L'orage ou la petite peureuse

De Mr Boucher de Perthes

Pour nous garantir de l’orage
Allons Collin dans le bosquet
J’espère que vous serez sage
Vous voyez bien le temps qu’il fait
Malgré l’avis que je vous donne
D’jà vous me serrez la main
Vous conduire ainsi quand il tonne
Oh ! Fi ! Monsieur que c’est vilain.

2ème Couplet

Encore malgré moi l’on ose…
Collin, Collin vous avez tort
Finissez ou vous serez cause
Monsieur, qu’il va tonner plus fort
Je vous l’avais dit : Quel tapage
Le tonnerre est tout près de nous
Ah ! Vous en ferez tant je gage
Collin, qu’il tombera sur nous.

3ème Couplet

Si pour vous sauver du naufrage
Un simple baiser suffisait
Collette en aurait le courage
Monsieur et vous le donnerait
Je ne consens, Veuillez l’entendre
Que pour vous tirer d’embarras
Du moment qu’il ne tonne pas.

4ème Couplet

D’en donner un quand je m’efforce
Quoi ! Vous voulez m’en prendre deux
Grand Dieu ! Vous les prenez de force
Et lorsqu’il tonne ; C’est affreux
Ah ! Si pour oser davantage
Vous étiez assez peu sensé
Attendez du moins que l’orage
Monsieur soit tout à fait passé.

Isnelle

 (Romance)

Oscar ne te plains pas d’Isnelle
Ne te plains pas d’elle, ô guerrier
Oscar ton amante est fidèle
A ton glaive, à ton bouclier
Courbé sous la main étrangère
N’attends pas un tendre retour
Quand tu disais le chant de guerre
Elle disait le chant d’amour.

Près de la tombe de ton père
Ne déplore plus tes malheurs
Cesse de pleurer ta misère
Quand l’étranger rit de tes pleurs
Lève ton front de la poussière
Que le vainqueur tremble à son tour
Oscar, redis le chant de guerre
Je redirai le chant d’amour.

Oscar l’avenir te regarde
Ecoute, entends-tu ces accords
Oscar c’est la lyre du barde
Prête à célébrer tes efforts
Sur la colline solitaire
Je t’attends à la fin du jour
Tu rediras le chant de guerre
Je redirai le chant d’amour.

Robert

(Romance)

Les preux avaient posé le glaive
Fatigué Robert sommeillait
Soudain il s’éveille, il se lève
Il frémit, un spectre parlait
Robert, disait l’ombre plaintive
Le cours du fleuve est incertain
Adieu Robert, sur l’autre rive
Nous nous verrons demain.

En vain appelant l’espérance
Ta main saisit ton bouclier
Ici la cuirasse, la lance
Ne préservent pas le guerrier
Regarde l’onde fugitive
Tu voudras t’arrêter en vain
Adieu Robert, sur l’autre rive
Nous nous verrons demain.

Comme j’ai bravé l’orage
J’ai ri de la fureur des flots
J’ai dit en quittant le rivage
La vague épargne le héros
Mais le temps fuit, la barque arrive
Au lieu marqué par le destin
Adieu Robert, sur l’autre rive
Nous nous verrons demain.

Une mère à sa fille divorcée

Quand je crus fixer ton bonheur
Je préparais donc ta misère
L’homme que te choisit mon cœur
Traite ma fille en étrangère
O ma Myrthé, que de tourments
Me réserva ce choix contraire,
Va, les chagrins que tu ressens
N’égalent pas ceux de ta mère.

2ème Couplet

Lorsque ton infidèle époux
Rompt ses liens avec outrage
Il te reste un bonheur bien doux
De ta vertu le témoignage
Vainement tu diras aussi
Que ton bonheur j’ai cru le faire
On ne rassure pas ainsi
La conscience d’une mère.

3ème Couplet

Puis-je au moins te dédommager
Par mon amour, par ma tendresse
La tienne a dû se partager
Un époux eut cette promesse
Mais dans mes bras consolateurs
Quand tu reviens dans ta misère
Seule je vais sécher tes pleurs
Ton cœur sera tout à ta mère.

4ème Couplet

Mais que dis-je, il te reste encor
De ton hymen ce tendre gage
Ta fille précieux trésor
Consolera ton long veuvage
A l’envie mon cher aimons là
Formons son cœur, son caractère
Puisqu’un père l’abandonna
Le ciel lui doit plus d’une mère.

Le premier bal

Hier au bal qu’elle était belle
Chacun l’admirait tout à tour
Et tous les yeux fixés sur elle
La contemplaient avec amour
C’était pour moi bonheur d’entendre
Dire son nom de tous côtés
Vanter son air tendre et modeste
Son élégance et sa beauté
Et pour parure, une humble fleur
Reposait là, seule sur son cœur. (bis)

2ème Couplet

Le cœur ému triste et timide
Je m’approchais pour lui parler
Je vis pâlir son air candide
Et je sentis sa main trembler
Est-ce une erreur, une folie ?
Je crus surprendre, ô doux instant
Sa lèvre pure et si jolie
Presser ma fleur en m’écoutant
Tout en pressant son humble fleur
Son doux regard prenait mon cœur. (bis)

3ème Couplet

Rempli de crainte et de tristesse
Déjà le bal allait finir
J’implorais d’elle dans mon ivresse
Un mot d’amour, un souvenir !
En me quittant sa main charmante
M’abandonna son frais lilas
Un jour ne m’oublierez vous pas
Et pour toujours son humble fleur
Reposera là sur mon cœur. (bis)

Viens dans ma nacelle

Brune enfant de Venise
Au sourire moqueur
Il faut que je te dise
Le secret de mon cœur
Je t’aime à la folie
Car le ciel d’Italie
N’a pas un bleu plus pur
Que ton regard d’azur.

Refrain

Viens dans ma nacelle
Au déclin du jour
Nous irons ma belle
Pour jaser d’amour

2ème Couplet

Chaque soir, ma charmante
Sous ton balcon fleuri
C’est pour toi que je chante
Ce refrain favori
Et lorsqu’à ta fenêtre
Je te vois apparaître
Je sens mon cœur frémir
D’ivresse et de plaisir.

Viens etc.

3ème Couplet

Quand glisse ma nacelle
Sur les flots diaprés
Je vois toujours ma belle
Ton visage adoré
En mon âme ravie
Je donnerai ma vie
Et le trône d’un roi
Pour un baiser de toi.

Viens etc.

Madeleine

Pourquoi donc toujours, ma chère
Aller au bord du ruisseau
Ce n’est pas non, je l’espère
Pour te regarder dans l’eau ?
Mais si, répond Madeleine
Je ne vais à la fontaine
Que pour mieux me voir là-bas
Car Jean dit que je suis belle
Et je veux, ajouta-t-elle
Savoir si Jean ne ment pas. (bis)

Pour mirer ton doux visage
C’est là perdre bien du temps
Il suffirait, je le gage
Au plus de quelques instants
Mais non, reprit Madeleine
Un mois suffirait à peine
Pour me tirer d’embarras
Jean dit qu’en moi tout sait plaire
Or il faut du temps, grand’mère.

Là voyons, dis-moi, ma fille
Qu’a répondu le ruisseau ?
Te dit-il la plus gentille
Du village ou du hameau ?
Mais oui, répond Madeleine
Baissant ses grands yeux d’ébène
Et se souriant tout bas
Mon pied, ma main, ma tournure
Et dit que Jean ne ment pas. (bis)

La place de l'absent

Sur la route pleine de neige
Un soldat marche à pas pesants
La nuit vient et le froid l’assiège
Il frappe chez des paysans
Une vieille en ouvrant la porte
Lui dit « Reposez vous un peu »
Et tout en parlant elle apporte
Un fagot qu’elle jette au feu.

Refrain

Mon fils est un soldat comme vous, à cette heure
Peut-être souffre-t-il sur la route sans fin
Dieu lui fasse trouver de même une demeure
Un bon feu s’il a froid et du pain s’il a faim.

2ème Couplet

Soldat, vous mangerez sans doute ?
L’âtre flambe, asseyez vous là
Demain vous vous mettrez en route
Taillez dans le pain que voilà
Vous allez boire un coup je pense
Pardieu, nous trinquerons tous deux
Avec moi buvez à la France
Pour que ses enfants soient heureux.

Au refrain

Les trois Idoles

Elle est aussi fière que belle
Chacun célèbre ses hauts faits
Chacun s’incline devant elle
Nos mains recueillent ses bienfaits
Il n’est rien qu’elle nous dérobe
Elle naît au son du tambour
Et les plis de sa blanche robe
Nous les baisons avec amour
La blonde déesse qui sème
L’or par les sillons rejetés
La première idole que j’aime      ]
Je la nomme la liberté.                ] bis

Celle-ci jette en sa balance
Grands et petits peuples et rois
Le rang, le nom et la naissance
Y sont pesés au même poids
De l’esclave brisant la chaîne
Du faible secondant l’espoir
Elle soumet la race humaine
A la seule loi du devoir
Thémis, elle, a ton diadème
Junon, elle, a ta majesté
La seconde idole que j’aime      ]
Je la nomme l’égalité.                 ] bis

C’est toi dont la libre devise
A réuni dans un faisceau
Les cœurs que ta voix électrise
Et dont la France est le berceau
Le vin dont tu remplis nos verres
Dans un mirage sans pareil
Nous montre tous les peuples frères
Libres et fiers sous ton soleil
Celle enfin dont le cri suprême
Dans l’univers est répété
La troisième idole que j’aime     ]
Se nomme la fraternité.              ] bis

Les serments de ma cousine

Vous souvenez-vous, ma blonde cousine
Du temps où pour deux nous n’avions qu’un cœur
Du temps où j’allais cueillir l’aubépine
Dont vous adoriez la douce senteur
Vous n’étiez encore qu’une pensionnaire
Moi, mon cœur venait de sonner vingt ans
Vous juriez alors de n’aimer sur terre
Que votre cousin… Mais de vos serments…

Refrain

Il ne reste plus, cousine, ma chère,
Qu’un bouquet fané, qu’un nœud de velours
Vous êtes hélas ! Femme d’un notaire
Cinq ou six marmots vous nomment leur mère
Et nos rêves d’or ont fui pour toujours.

2ème Couplet

Vous souvenez-vous, charmante cousine
Du temps où joyeux comme des pinsons
Le long du sentier bordé d’églantine
Nous jetions dans l’air nos folles chansons
Vous alliez courant comme une gazelle
Sans souci du vent, ce grand indiscret
Qui plus d’une fois me fit voir, ma belle,
Un mollet charmant… Mais de ce mollet…

Il ne reste plus etc.

Il ne reste plus, cousine, ma chère,
Qu’un bouquet fané, qu’un nœud de velours
Vous êtes hélas ! Femme d’un notaire
Cinq ou six marmots vous nomment leur mère
Et nos rêves d’or ont fui pour toujours.

3ème Couplet

Dis, te souviens tu, ma belle cousine
De ce soir d’automne, où silencieux
Sur le petit banc, près de la chaumine
Assis tout émus nous rêvions tous deux
Tu laissas tomber ta main dans la mienne
Ma lèvre à ta lèvre osa se poser
Depuis, j’ai gardé de ta douce haleine
Le divin parfum… Mais de ce baiser…

Il ne reste plus etc.

Lettre d'une cousine à son cousin

(trouvée et décachetée)

Je ne voulais pas vous écrire
Mail il faut faire son devoir
Il le faut et je dois vous dire
Ce qui s’est passé l’autre soir
Dans le salon bleu, chez grand’mère
On a parlé de vous, cousin
On en a parlé de manière
A lui causer bien du chagrin
Je me faisais toute petite
Pour entendre ce qu’on disait
On blâmait fort votre conduite
Elle est déplorable, il parait.

Refrain

Tout ça, vous comprenez, tout ça, ne me fait rien
Ce que je vous en dis, moi, c’est pour votre bien.

On disait, c’est épouvantable
Que vous passiez toutes vos nuits
Dans un cercle, autour d’une table
Ou d’autres Messieurs sont assis
Et là, d’une voix enfiévrée
Huit, neuf, banco je prends la main !
Quand la séance est terminée
Vous n’avez plus visage humain
C’est un spectre qu’on voit paraître
On disait qu’avec un tel goût
Cousin, vous finirez par n’être
Plus gentil, plus gentil du tout.

Tout ça, vous (etc.)

On disait encore autre chose
Mais ce terrain est si brûlant
Que je m’arrête et que je n’ose
Allons, il le faut cependant
On disait… C’était la baronne
Elle en riait (C’était très mal)
Que vous aimiez une personne
Qu’on admire au Palais royal
Encore, ajouta la baronne
En se pendant pour parler bas
S’il n’avait qu’elle pour maîtresse !
Mais il en a des tas, des tas !

Lorsque l’on eût fini grand’mère
Joignit les mains puis dit : « hélas ! »
Il est perdu, j’en désespère
Moi je n’en désespère pas
Le péril est bien grand, sans doute,
Et cependant si tu voulais,
Si j’étais à ta place, écoute
Moi, vois tu je me marierais !
Je chercherais dans ma famille
Dans la famille c’est meilleur
Quelque brave petite fille
Que j’aimerais de tout mon cœur.

Tout ça, tu le comprends, tout ça ne me fait rien
Ce que je t’en dis, moi, cousin, c’est pour ton bien.

L'oublié

(Romance)

Depuis longtemps la bataille est finie
La nuit descend sur le lieu du combat
Mais dans la plaine, un long cri d’agonie
Gémit au loin, c’est la voix d’un soldat
Tombé mourant sur le bord d’une haie
Sous l’herbe haute il expire oublié
Et cherche encore de sa voix étouffée
A faire entendre un cri désespéré.

Refrain

France, dit-il, ô ma patrie
Entends ma voix, ne laisse pas
Dormir sur la terre ennemie
Loin de toi, l’un de tes soldats
France, mère chérie
Ne m’abandonne pas.

2ème Couplet

Je veux revoir ma mère et Madeleine
De mon enfance embrasser les amis
Voir les blés mûrs onduler dans la plaine
Sous le soleil radieux du pays
Je veux revoir du vieux drapeau de France
Les trois couleurs flotter libres au vent
C’est de mon cœur la sublime espérance
Le dernier vœu du soldat expirant.

France, dit-il (etc.)

3ème Couplet

Aucune voix ne répondit dans l’ombre
A cet appel, dernier cri du blessé
Et regardant alors le tableau sombre
Qu’autour de lui la mort avait laissé
Il s’écria « Sombre et fatale guerre
Dont la main frappe et la mère et l’enfant
Toi que de sang couvres partout la terre
Je te maudis devant Dieu qui m’entend. »

France, dit-il, ô ma patrie (etc.)

A victor Hugo

Si le hasard combla notre naissance
Si le destin pour nous fut généreux
Sur les enfants de la triste indigence
Ne jetons pas un regard dédaigneux
Rappelons-nous que, prêchant l’Evangile,
Jésus disait en s’adressant à tous
Pour être heureux le secret est facile
Soyons aimants, charitables et doux.

Refrain

Il ne faut mépriser personne
L’affreux haillon peut cacher un trésor
Et sous l’habit grossier qui l’emprisonne
Bien souvent (bis) bat un cœur d’or,

2ème Couplet

Combien de fois une faute légère
A fait tomber dans les sentiers du mal
Des malheureux qu’une main tutélaire
Eut enlevés à l’esprit infernal
Des préjugés, misérables victimes
Chassés partout ainsi que des lépreux
Et repoussés d’abîmes en abîmes
Ils vont rouler au fond du gouffre affreux.

Il ne faut mépriser personne (etc.)

3ème Couplet

Dans vos ébats, le cœur plein d’allégresse,
Enfants, pourquoi détourner le regard
D’un autre enfant, vous implorant sans cesse
Pourquoi le fuir en l’appelant bâtard
Faut-il sur lui faire tomber le blâme
Sa mère hier en proie à la douleur,
Sur un grabat expirait, pauvre femme
Que délaissait un lâche séducteur.

Il ne faut mépriser personne (etc.)

4ème Couplet

Là, ce vieillard que la misère oppresse
Un jour, hélas ! Ses enfants avaient faim
Et n’écoutant que sa vive tendresse
Il a volé pour leur donner du pain…
A la justice ayant payé sa dette
Vers l’atelier il reprend son essor
Homme flétri partout on le rejette
Doit-il mourir… ou bien… voler encore ?

Il ne faut mépriser personne (etc.)

5ème Couplet

L’arrêt est juste et le juge équitable
L’homme de bien doit être protégé
Mais devons-nous flétrir le misérable
Que le pardon souvent eut corrigé ?
Par la bonté remplaçons la colère
Homme sois doux, tu seras regretté
Lorsque ton corps dormira sous la pierre
Où le Seigneur écrit « égalité ».

Il ne faut mépriser personne (etc.)

Le secret de bébé

Je connais depuis l’automne
Un bébé des plus charmants
Dont la sœur, chère mignonne,
Fût poitrinaire à quinze ans
Quand je vis la blonde tête
De ce gracieux lutin
Il parcourait en cachette
Les sentiers d’un grand jardin.

2ème Couplet

Les menottes potelées
Tenaient un fil qu’il roulait
Autour des branches fanées
Que parfois il atteignait
Que fais-tu là petit homme ?
L’enfant surpris me toisa
Puis souriant voici comme
A voix basse il me parla.

3ème Couplet

Tu me plais je vais te dire
Quel est mon secret à moi
Si tu me promets sans rire
De le bien garder pour toi
Et d’abord je dois t’apprendre
Que je me nomme Bébé
Que j’ai, ça va te surprendre
Mes cinq ans depuis l’été.

4ème Couplet

Pour jouer à la cachette
Je suis tout seul à présent
Car bien mal allait soeurette
Le docteur vient très souvent
Ce docteur n’est pas sévère
Et ne paraît pas méchant
Cependant petite mère
Pleure toujours en l’écoutant.

5ème Couplet

Hier j’ai voulu connaître
Ce qui la faisait pleurer
J’étais curieux peut-être
Monsieur tu vas me gronder
Sous un meuble, avec mystère
Hier je me suis caché
Le docteur causait à mère
De là j’ai tout écouté.

6ème Couplet

Il disait « Voyez à terre
Combien de feuilles déjà
Quand tombera la dernière
La chère enfant s’en ira
Voilà pourquoi je rattache
Les feuilles qui vont tomber
Et c’est une grande tâche
Dis, Monsieur, veux-tu m’aider ?

La folle de la plage

Flots bleus, vagues craintives
Mon enfant sur la rive
Jouait et de là bas
Vous couriez sur ses pas
Malgré son tout jeune âge
Et malgré mon amour
Vous l’aviez sans retour
Arraché de la plage
Voici venir la nuit
Ayez bien soin de lui. (bis)

2ème Couplet

Donnez lui des fleurs rares
Des coquilles bizarres
A tout s’il répond non
Redites lui mon nom
Et s’il refuse encore
Vos présents pour pleurer
J’irai le retrouver
A la première aurore
Voici venir la nuit
Ayez bien soin de lui. (bis)

3ème Couplet

Mais le bruit des tempêtes
A passé sur nos têtes
Et le vent, oui le vent
Souffle bruyamment
Mon pauvre petit pleure
Et de froid et de faim
Oh ! Va ne pleure point
Nous dormirons ensemble
Quand fut venue la nuit
Elle était avec lui. (bis)

Passera-t-il ? Passera-t-elle ?

Pimpant l’arme sur l’épaule
Gaston, chasseur de chamois
Vers le torrent du vieux saule
Arrive au détour du bois
En jupon court, coiffe blanche
Fanchette apparaît soudain
Un pont formé d’une planche
Barre à tous deux le chemin.

Refrain

Passera-t-il, passera-t-elle ?
Dam’ ça peut embarrasser
Etroite est la passerelle
A deux l’on ne peut passer.

2ème Couplet

Gaston lorgne la fillette
Gentille à croquer, ma foi
Il est bien se dit Fanchette
Dont le cœur tremble d’émoi
Puis voyant qu’elle l’évite
Comme il ne se trompait pas
Gaston s’incline et l’invite
A prendre sur lui le pas.

Passera-t-il (etc.)

3ème Couplet

Des deux côtés se la rive
On hésite à qui mieux, mieux
Si bien qu’enfin l’on arrive
Au milieu du pont tous deux
Là, sous les pieds l’onde passe
Fanchette tremble encore plus fort
Gaston de ses bras l’enlace
Pour la mettre à l’autre bord.

Passera-t-il (etc.)

4ème Couplet

En entourant son corsage
Gaston la sent palpiter
Il effleure son doux visage
Et dam’ comment l’éviter
Quand doucement il la pose
Un doux bruit a retenti
Fanchette le front encore rose
Se retourne, il est parti.

En regardant la passerelle
Qu’il parcourt d’un pas pressé
Avec un soupir la belle
Semble dire : Déjà passé !

Les cloches de Noël

Il faisait nuit, la neige sur la terre
Comme un manteau d’hermine s’étendait
Dans la campagne et le bois solitaire
Dans le lointain le corbeau croassait
Il appelait toute sa voletaille
A ses côtés, car plus d’un trépassé
Gisait alors sur un champ de bataille
Où gémissait un malheureux blessé.

Refrain

La cloche sonne (bis)
Au fond des bois, au milieu de la nuit
Elle résonne (bis)
Disant « Chrétien, accours, il est minuit. »

2ème Couplet

Et le mourant disait « Ma vieille mère
Près du foyer peut-être encore m’attend
Ne pensant pas, que son fils fort naguère
Loin du pays succombe maintenant
Et toi, corbeau, triste oiseau sanguinaire
Forban féroce accouru du vieux Nord
Si tu t’en vas au pays : sans mystère,
A ceux que j’aime oh ! dis que je suis mort. »

La cloche (etc.)

3ème Couplet

Puis il se tut, sur son visage pâle
La lune alors jeta quelques rayons
Et sur son corps quand eut fini le râle
On vit s’abattre et corbeaux et faucons
Mais loin de là, de ce champ mortuaire
Bien loin là bas dans un triste taudis
Sur un grabat expirait une mère
Tout en mourant, elle appelait son fils.

La cloche (etc.)

4ème Couplet

 « Oh ! Disait-elle, Oh ! Grand Dieu, lui que j’aime
Ne viendra pas même pour m’assister
Je sens, je vois accourir la mort blême
Et la voilà toute prête à frapper »
Et la maison devint silencieuse
La cloche au loin se mit à résonner
En semblant dire à la foule pieuse
Où deux mortels là-haut vont s’embrasser.

La cloche (etc.)

La poitrinaire

Mon Dieu, mon Dieu, exauce ma prière
Entends, entends mes douloureux accents
Je suis bien jeune et je suis poitrinaire
Je vais mourir et je n’ai que quinze ans
Délivre moi de cette maladie
Ferme la tombe qui va m’ensevelir
Je n’ai pas vu le printemps de ma vie
Dieu tout puissant, ne me fait pas mourir. (bis)

Je sais pourquoi tu me laisses souffrante
Tu n’es pas le dieu de ma religion
Tu m’as maudis car je suis protestante
Et n’aurai pas ta bénédiction
Mais à tout prix il faut que je l’obtienne
Il n’y a que toi qui puisses me secourir
Si j’en reviens je me ferai chrétienne
Dieu tout puissant, ne me fait pas mourir. (bis)

Tu sais, mon Dieu, que mon malheureux frère
Est parti pour un lointain pays
Tu sais mon Dieu en qui mon cœur espère
Oh ! Dis moi donc, reverra-t-il Paris
Auprès de moi, reprendra-t-il sa place
Dans l’océan ira-t-il s’engloutir
Mais s’il revient il faut que je l’embrasse
Dieu tout puissant, ne me fait pas mourir. (bis)

Ainsi parlait une jeune colombe
A la voix douce, au regard langoureux
Et maintenant elle est dans une tombe
A la nature elle a fait ses adieux
Pourquoi faut-il qu’une vertu si chère
Dans une tombe aille s’ensevelir
Mais la vertu n’est pas d’être sur terre
Dieu tout puissant, tu l’as donc fait mourir. (bis)

Gardez-vous de vieillir

Pourquoi passer si tôt, temps heureux et chimères
Age d’or, jours d’espoir aux rêves enivrants
Aux doux rayons d’amour, des plaisirs éphémères
Devraient nous suivre hélas au-delà de vingt ans
L’on croit si bien alors qu’il n’est point de mensonge
Tout est vrai, le passé, le présent, l’avenir
Mais ce n’est qu’un beau rêve et pour qu’il se prolonge
Gardez-vous, gardez-vous de vieillir.

Esclaves de la foi, au serment qui vous lie
Dans votre loyauté vous croyez, pauvres fous,
Au serment solennel d’une femme chérie
Qui prendra pour témoins, le ciel, l’honneur et vous
Mais laissez faire au temps et vos croyances pures
Feront place à la haine, au deuil, au repentir
Si vous ne voulez pas connaître le parjure
Gardez-vous, gardez-vous de vieillir.

Insensés, croyez-moi, il n’existe sur terre
Qu’un sentiment réel, sans égal, éternel
Ce sentiment sacré, notre Dieu tutélaire
Est notre seul ami, c’est l’amour maternel
Il veillera sur nous jusqu’au bord de la tombe
Rien ne peut l’altérer, rien ne peut l’affaiblir
Mais si trop tôt hélas votre mère succombe
Gardez-vous, gardez-vous de vieillir.

Hommage à un ami le jour de son Mariage

Lorsqu’aujourd’hui l’hymen t’engage
Et couronne enfin ton amour
Permets que sur ton mariage
Je te félicite à mon tour
Par une chaîne fortunée
Pour toujours te voilà lié
Mais j’espère que l’hyménée
Chez lui recevra l’amitié.

La tienne me fut toujours chère
Et bien franchement je le dis
Je te regardais comme un frère
Comme le meilleur des amis
Prenant femme jeune et jolie
Dont l’amour a fait ta moitié
Tu peux encore passer ta vie
Entre l’amour et l’amitié.

Avec l’objet que ton cœur aime
Il est au comble de ses vœux
Et de voir ton bonheur suprême
Moi je jouis, je suis heureux
A ton hymen digne d’envie
Tout doit être sacrifié
Mais accorde, je t’en supplie
Un souvenir à l’amitié.

Suzette

Suzette aux couleurs plus fraîches
Que ses pêches
Suivait du marché voisin
Le chemin
Ne sachant comment s’y prendre
Pour bien vendredi
Le contenu du panier
Tout entier
On a eu soin de m’apprendre
Le secret du métier
C’est de ne pas laisser prendre
Le dessus du panier.

2ème Couplet

J’irai bien de ma corbeille
Sans pareille
Au château porter mes fruits
Accomplis
Mais le vieux Seigneur bizarre
Qu’est avare
S’il me voyait passer
Voudrait m’embrasser
Nous ne saurions nous entendre
Car il voudrait essayer
Comme l’autre fois de prendre
Le dessus du panier.

3ème Couplet

Si je vends bien ma douzaine
Pour ma peine
J’aurai, Maman me l’a dit
Mon profit
Ce sera pour ma toilette
A la fête
L’on aura des yeux je crois
Que pour moi
Les danseurs vont d’un air tendre
M’inviter, me prier
Heureux dans le bas de prendre
Le dessus du panier.

4ème Couplet

Pour me distraire, j’écoute
Sur la route
Les compliments caressants
Des passants
Il m’arrive de sourire
Et de dire
Plus d’un compliment courtois
A la fois
Certes à force d’en entendre
Je puis en oublier
Et me contenter de vendredi Le dessus du panier.

5ème Couplet

On arrive sans qu’on y pense
A la danse
On vous demande soudain
Votre main
On promet d’être fidèle
Un modèle
Et le cœur tout ébloui
Répond oui
Pour être heureuse en ménage
Le tout est d’essayer
De vendre dans le village
Le dessus du panier.

L'Indienne

Un beau navire à la riche carène
Allait quitter les plages de Madras
Quand sur la route une jeune indienne
À sa compagne ainsi parlait tout bas.

Refrain

Si tu le vois, dis lui que je l’adore
Rappelle lui qu’il m’a donné sa foi
Demandes lui s’il me regrette encore
S’il se souvient d’avoir vécu pour moi.

2ème Couplet

Tu vas joyeuse au beau pays de France
Pour des plaisirs changer de liberté
Mais las ! Zémire, on dit que l’indigence
Aime à braver les pleurs de la beauté.

3ème Couplet

Tu sauras bien le découvrir sans peine
Sa voix est fière et tremble tout à tour
Et son œil noir qu’ombrage un ciel d’ébène
T »embrasera de tous les feux d’amour.

4ème Couplet

Tu m’enverras par le prochain navire
Les mots d’amour qu’il doit te confier
Mais juste Dieu ! Ne m’écris pas Zémire
Si pour une autre il a pu m’oublier.

Si tu le vois etc.

Le Printemps

Enfin l’air s’épure
Le gazon verdit
Le ruisseau murmure
Le ciel resplendit
Au val, dans la plaine
Quel souffle embaumé
C’est ta douce haleine
Printemps bien-aimé. (bis)

O saison charmante
Du gai renouveau
Où tout rit, tout chante
Tout est jeune et beau
Fleur humble ou superbe
Oiseau, prés, buissons,
Insecte ou brin d’herbe
Tout dit sa chanson. (bis)

Printemps de délices
Aux riants atours
Dans tes purs calices
Naissent les amours
Des plus douces choses
Tu nous fais jouir
Les cœurs et les roses
Vont s’épanouir. (bis)

Mimi - Soleil

Dans la plus humble des chambrettes
Du turbulent quartier latin,
La plus charmante des grisettes
S’éveilla reine un beau matin
Fêtant l’éclat qui l’environne
Coupe en main je la vois encore
Mettant en guise de couronne
Des baisers sur ses cheveux d’or.

Refrain

Elle naquit parmi les roses
Un jour dans un rayon vermeil
Et pour fêter ces douces choses
On l’appela mimi soleil.

Il est un fait que je dois dire
C’est que sa Majesté Mimi
N’ayant jamais appris à lire
N’était savante qu’à demi
Mais elle adorait les charmilles
Et l’ombre des bois enchanteurs
D’où le rossignol dit les trilles
Dont il est le compositeur.

Elle naquit etc.

Ses dents de perles, ô richesse
Encadrées dans un pur corail
A coup sûr plus d’une princesse
Eut envié leur riche émail
Elle était bien cette fillette
Au doux sourire, aux gais élans
Et la filleule de Muzette
Et la sœur de Mimi-Printemps.

Elle naquit etc.

Aujourd’hui ses lèvres sont closes
Closes pour l’éternel sommeil
Et nul ne vient fleurir de roses
La tombe de mimi soleil
Plus clément pour elle en l’espace
Visitant les cyprès ombreux
C’est le soleil qui seul remplace
Les ingrats qu’elle fit heureux.

Elle naquit etc.

La saison des cerises

Dans la ferme j’entrais gaiement
A la saison dernière
Là je saluais poliment
La gentille fermière
Je cherche un endroit, le meilleur
Pour souper quoiqu’il coûte
Belle, guidez un voyageur
Egaré sur sa route.

Refrain

Oh cerises, quand reviendra
L’heure des tièdes brises
Mon cœur toujours se souviendra
Et toujours l’amour aimera
La saison des cerises.

La fermière au jupon rayé
Dans son sabot de hêtre
Avait le plus beau petit pied
Qu’Amour vit apparaître
Entrez, dit-elle, c’est ici
Que la piquette est bonne
Mais tant qu’à l’argent, Dieu merci,
Je ne vends pas, je donne.

La belle s’en alla quérir
Dans de blanches corbeilles
Fraîches, suaves à ravir
Des cerises vermeilles
Un faux pas lui fit grand frayeur
Et soudain la fillette
Tomba son cœur contre mon cœur
En faisant la cueillette.

Belle fermière, adieu, jamais
Dans ce pays peut-être
La fleur qui pousse en vos guérets
Ne me verra paraître
Mais j’emporte un doux souvenir
Dans mes bras, ô mignonne
Un instant j’ai pu vous tenir
Sans offenser personne.

Refrain

Oh cerises quand reviendra
L’heure des tièdes brises
Mon cœur toujours se souviendra
Et toujours l’amour aimera
La saison des cerises.

Les hirondelles

Captif au rivage du Maure
Un guerrier courbé sous ses fers
Disait : Je vous revois encore
Oiseaux ennemis des hivers
Hirondelles que l’espérance
Suit jusqu’en ces brûlants climats
Sans doute vous quittez la France
De mon pays ne me parlez-vous pas ?

Depuis trois ans je vous conjure
De m’apporter un souvenir
Du vallon où ma vie obscure
Se berçait d’un doux avenir
Au détour d’une eau qui chemine
A flots purs sous de frais lilas
Vous avez vu notre chaumine
De ce vallon ne me parlez-vous pas ?
L’une de vous peut-être est née
Au toit où j’ai reçu le jour
La d’une mère infortunée
Vous avez dû plaindre l’amour
Mourante elle croit à toute heure
Entendre le bruit de mes pas
Elle écoute et puis elle pleure
De son amour ne me parlez-vous pas ?

Ma sœur est-elle mariée ?
Avez-vous vu de nos garçons
La foule aux noces conviée
La célébrer dans leurs chansons ?
Et ces compagnons du jeune âge
Qui m’ont suivi dans les combats
Ont-ils revu tous le village ?
De tant d’amis ne me parlez-vous pas ?

Sur leurs corps l’étranger peut-être
Du vallon reprend le chemin
Sous mon chaume il commande en maître
De ma sœur il trouble l’hymen
Pour moi, plus de mère qui prie
Et partout des fers ici bas…
Hirondelles de ma patrie
De ses malheurs ne me parlez-vous pas ?

La peur d'aimer

Fuyez, fuyez, je crains votre présence
Et vous venez troubler mes heureux jours
J’étais heureux pendant votre absence
J’aurais voulu qu’elle durât toujours
Pour mon bonheur, vous cherchez à me plaire
Et vous suivez la trace de mes pas
Mais ici bas l’amour n’est qu’éphémère
La peur d’aimer fait que je n’aime pas. (bis)

Vous m’adorez votre voix me le jure
Et vos serments me dites-vous sont vrais
Oh ! Si jamais vous deveniez parjure
Moi vous aimant de douleur j’en mourrais
Ne tentez pas une épreuve cruelle
Il est des cœurs qui seront moins ingrats
Pour éviter une peine éternelle
La peur d’aimer fait que je n’aime pas. (bis)

Quand vous cherchez des yeux une autre femme
Je sens au cœur un tourment inconnu
Je sens en moi se déchirer mon âme
Lorsque le soir vous n’êtes pas venue
Oh ! Quand une autre obtient votre sourire
Si vous saviez ce que je souffre hélas !
Mon Dieu, mon Dieu, faut-il donc tout vous dire
La peur d’aimer fait que je n’aime pas. (bis)

Pedro

(Romance)

Viens avec moi ma charmante andalouse
Disait Pedro beau garçon de vingt ans
Antonia tu seras mon épouse
La jeune fille avait dix huit printemps
Quand vint le bal oh ! Que de douces choses,
Lui dit Pedro la pressant sur son cœur
Voit ce beau ciel et ces nuages roses
Font présager d’ineffables bonheurs !

Refrain

Valsons, valsons belle adorée
Laisse moi te presser la main
D’amour mon âme est enivrée
Valsons, valsons jusqu’à demain.

 

Nos amoureux sous l’archer qui résonne
Frappent le sol de leurs pas cadencés
Et l’heureux couple au plaisir s’abandonne
Sans voir le bras dont il est menacé
Mais les projets hélas, sont des mensonges
Serments d’amour font oublier la mort
L’heureux amant bercé par un doux songe
Sans réfléchir va redisant plus fort.

Valsons, valsons (etc.)

Il est trop tard pour la jeune andalouse
Pedro se trouve en face d’un rival
Homme cruel et d’une humeur jalouse
A sa maîtresse il porte un coup fatal
Le bon Pedro voit mourir son amante
Depuis ce jour il n’a plus sa raison
Dès qu’il entend une valse entraînante
Le pauvre fou va disant sa chanson.

Valsons, valsons (etc.)

Mes Amours

(Romance)

J’aime la fleur qui vient d’éclore
J’aime l’étoile du matin
Quand se lève la pâle aurore
Au fond d’un horizon lointain
J’aime à voir passer sur la rive
Les matelots chantant le soir
J’aime la lueur fugitive
Des éclairs par un temps bien noir.

J’aime en entrant dans une église
Voir tout un peuple prosterné
De l’océan j’aime la brise
L’esquif par les flots entraîné
J’aime à courir dans la campagne
Par les bois, les sentiers ombreux
J’aime la plus haute montagne
Qui semble mener dans les cieux.

J’aime dans la vaste prairie
Le ruisseau limpide et bruyant
Qui parcourt sa route fleurie
Ainsi que l’oiseau gazouillant
Mais rien ne vaut encor l’amie
Que j’aime et qui me le rend bien
Dieu me la donna pour la vie
Elle a mon cœur et j’ai le sien.

Jean le Pêcheur

Jean le pêcheur adorait Madeleine
La pauvre enfant le payait de retour
Mais pauvre, hélas, Jean vivait de sa pêche
L’on sépara ce qu’avait joint l’amour
Pourtant un soir près de la croix de pierre
A son ami Madeleine donna
L’anneau d’argent qui venait de sa mère
En lui disant : Porte ce gage là.

Je suis ta fiancée
Sur terre et devant Dieu
Désormais ma pensée
Va te suivre en tous lieux
Et si ta voix chérie
Vient réclamer ma foi
Eperdue et ravie
J’irai vers toi. (bis)

Un brick partait pour la rive lointaine
Aux passagers promettait un trésor
Jean s’embarqua pensant à Madeleine
Car il devait rapporter un peu d’or
La pauvre enfant arrive sur la plage
Quand le vaisseau fendait les flots amers
Mais tous pleuraient elle seule criait courage
En répétant l’œil fixé sur la mer.

Je suis ta fiancée etc.

Six mois après on courait au rivage
C’est lui, c’est Jean, Jean qui revient heureux
Mais sur le port s’est déchaîné l’orage
Le brick s’entrouvre et sombre à tous les yeux
Tout disparaît hommes et riche carène
Mais qui là-bas s’élance dans les flots
Oh juste ciel ! C’est Madeleine
Malgré la foudre entendez-vous ces mots.

Reçois ta fiancée
Ensemble allons vers Dieu
Tu m’avais délaissée
Bien triste en ces lieux
Que ferai-je sans toi
Sans regret Madeleine
S’en va vers toi. (bis)

Les Bandits de la montagne

Tu vas aller sur la montagne
Avec de farouches bandits,
Pour une sinistre campagne
Ce soir vous serez tous partis
Et pourtant tu m’avais dit « Berthe
Que le ciel consomme ma perte
Si le passé revient jamais ».

Refrain

Aux conseils du mauvais génie
Résiste encor comme autrefois
Fabio c’est moi, c’est ton amie
Entends mon cœur, entends ma voix.

2ème Couplet

Qu’importent dédain et misère
Si je les partage avec toi
On ne croit pas ton cœur sincère
Qu’importe encore si Dieu te voit
Reste auprès de celle qui t’aime
Reste sur la route du bien
Quand on peut s’estimer soi-même
Le mépris des autres n’est rien.

Au refrain

3ème Couplet

Il n’écouta pas sa compagne
Fit taire ses pleurs et ses cris
Et s’en alla dans la montagne
Avec ses compagnons bandits
Le lendemain le cœur rebelle
Passait par des soldats conduits
Berthe est morte, priez pour elle
Mais priez encor plus pour lui.

Refrain

Aux conseils du mauvais génie
Résiste encor comme autrefois
Fabio c’est moi, c’est ton amie
Entends mon cœur, entends ma voix.

Au pays de Mireille

Lorsque je rêve à la belle Provence
A son soleil qui réchauffe le cœur
De mon pays j’ai douce souvenance
Car c’est là-bas que m’attend le bonheur,
A l’exilé que la patrie est chère
Sous l’olivier auprès de ma maison
Souvent Mireille à la brise légère
Dans un soupir a murmuré mon nom,
Au pays de Mireille
J’ai laissé mon amour
O Provence vermeille
Espère en mon retour.

2ème Couplet

Oui, c’est là-bas dans mon petit village
Que l’air est doux et que le ciel est pur.
Les orangers fleuris sont sur la plage
Où vient mourir la vague aux flots d’azur
Les rossignols ont plus de mélodie
Quand chaque soir ils chantent leurs amours
Puis j’aime tant ma brune si jolie
Sous son bonnet aux rubans de velours.

Refrain

Au pays de Mireille
J’ai laissé mon amour
O Provence vermeille
Espère en mon retour.

3ème Couplet

Souvent mon cœur dans un rêve s’envole
Vers ce pays où je fus bien heureux
Et nous allons courir la farandole
En nous grisant de notre amour tous deux
Dans les vallons où chantent les cigales
Nous nous aimons sous notre bon soleil
Je crois revoir nos belles Provençales
Je suis heureux hélas jusqu’au réveil.

Refrain

Au pays de Mireille
J’ai laissé mon amour
O Provence vermeille
Espère en mon retour.

Connais-tu l'Amour ?

Pâle voyageur, connais-tu l’amour
Comme tout le monde en rêvant un jour
Je l’ai rencontré fleuri d’espérances
Et j’ai pris ma place avec les élus
J’avais dans le cœur toutes les croyances
Il m’en a tant pris que je n’en ai plus.

Belle aux cheveux d’or, connais-tu l’amour
Comme tout le monde en rêvant un jour
Om a dit mon nom avec tant de charme
Que j’ai cru tenir l’éternel bonheur
Hélas ! J’ai depuis versé tant de larmes
Que c’est par les yeux qu’est parti mon cœur.

Si, pauvre mignonne, tu connais l’amour
Fais le moi connaître en rêvant un jour
Selon moi, vois-tu c’est l’indifférence
Qui blesse le cœur et le fait souffrir
Eh bien si l’amour est une souffrance
Donne m’en Mignon, dusse-je en mourir.

Le petit soulier

Oui, je le jure, oui, foi de capitaine
Margarita je t’aime comme un fou
Oui je suis fou de tes cheveux d’ébène
Qui font jaillir la blancheur de ton cou
Oui, je suis fou ma divine espagnole
De tes yeux noirs que j’aime à voir briller
Par-dessus tout j’ai l’âme folle
De ton joli petit soulier.

Refrain

Beau capitaine, au doux langage
M’aimeras-tu toujours, toujours
En France on est, on est volage
Mais en Espagne on peut mourir d’amour. (bis)

2ème Couplet

Je t’aime, enfant, je t’aime et je suis capitaine
Faut-il jurer par le ciel et l’enfer
Avant crois moi de briser notre chaîne
De mon épée on briserait le fer
Te souviens-t-il du regard téméraire
Que te lança ce brillant officier
L’imprudent dort sous cette terre
Que foule ton petit soulier.

Beau capitaine etc.

3ème Couplet

Un mois après, un mois notre beau capitaine
Escaladait un bateau à minuit
Sur son chemin la jalousie amène
Margarita qui voit qu’on la trahit
Le lendemain, chacun sur le rivage
Disait « là-bas, voyez donc batelier
Quel est cet objet qui surnage
Ce n’est rien qu’un petit soulier. »

Refrain

Le capitaine au doux langage
Avait aimé mais un seul jour
En France, on est, on est volage
Mais en Espagne on sait mourir d’amour.

Le Sentier

Vous souvient-il de ce sentier
Plein de violettes et de roses
Où pendant plus d’un mois entier
Nous dîmes de bien douces choses. (bis)

Vous souvient il de ce bosquet
De ce gazon à l’herbe verte
Où tout en faisant un bouquet
Votre âme, à moi s’est entr’ouverte. (bis)

Vous m’aimiez alors disiez-vous
Autant qu’on peut aimer sur terre
Et j’écoutais à deux genoux
De votre cœur le doux mystère. (bis)

Gazon, bosquet, toutes ces choses
Et le sentier sont là toujours
Et j’y revois les mêmes roses
Mais hélas ! Où sont nos amours ? (Bis)

Le Mendiant

(Mélodie)

Refrain

Petits enfants, écoutez la prière
Du malheureux qui vers vous tend la main
Un peu de pain pour calmer sa misère
Peut-être, hélas ! Vous mendierez demain.

J’eus comme vous une mère chérie
Dont les baisers, les caresses d’amour
A embelli le printemps de la vie
Mais ô malheur, je la perdis un jour.

Refrain

Petits enfants, écoutez la prière
Du malheureux qui vers vous tend la main
Un peu de pain pour calmer sa misère
Peut-être, hélas ! Vous mendierez demain.

J’eus des amis au temps de ma richesse
Je crus longtemps à leurs serments trompeurs
Hélas un jour la fortune traîtresse
M’a tout repris, ils m’ont fermé leur cœur.

Petits enfants (etc.)

J’ai tout perdu, bonheur, amour, richesse
Et les chagrins ont blanchis mes cheveux
Plus un enfant pour guider ma vieillesse
Plus un ami pour me fermer les yeux.

Petits enfants

Reviens

(Mélodie)

Je t’adorais sans te le dire
Ta présence me suffisait
Ta voix, ton regard, ton sourire
Un mot de toi, tout me disait
Que loin de toi s’il fallait vivre
Vivre pour moi serait mourir
Tu pars et je ne puis te suivre
Il me faut apprendre à souffrir.

Refrain

Si dans ta nouvelle patrie
On ne t’aime pas comme moi
Reviens, car mon cœur et ma vie
N’auront pas cessé d’être à toi. (bis)

Je n’irai plus dans la prairie
Cueillir le bouquet du matin
Pour l’attacher, pauvre Marie
A ton corsage de satin !
Les fleurs, les oiseaux du bocage
Hélas ! Pour moi n’ont plus d’attraits
En désertant notre village
Tu n’as laissé que des regrets.

Si dans ta (etc.)

Je n’irai plus dans la vallée
Où j’ai goûté tant de bonheur
En vain mon âme désolée
Y chercherait partout sa sœur
Dans ma retraite solitaire
Je vivrai de ton souvenir
Et si je vis c’est que j’espère
Te voir un jour me revenir.

Refrain

Car dans ta nouvelle patrie
Nul ne t’aimera comme moi
Tu reviendras, mon cœur, ma vie
N’auront pas cessé d’être à toi. (bis)

Regrets de 20 ans

J’avais vingt ans, cet âge plein de charme
Etait pour moi le printemps des amours
J’étais heureux et jamais une larme
N’avait troublé l’éclat de ces beaux jours
Mon avenir, rayonnant d’espérance
Apparaissait comme un rêve enchanteur
Je ne pensais jamais à la souffrance
Qui vient plus tard nous déchirer le cœur. (bis)

J’aimais alors comme on aime à cet âge
Avec transport, rempli des premiers feux
Je ne voyais partout qu’heureux présage
Je me croyais transporté dans les cieux
Il est si doux d’être aux pieds d’une amante
Qui vous chérit et donne avec bonheur
Tous les trésors d’une nature ardente
Trésors charmants d’ineffable douceur. (bis)

Un jour hélas ! Ô jour plein d’amertume
Je ne vis plus l’azur de ses beaux yeux
Tout avait fui, bonheur, rêve et coutume
Je restai seul ici bas malheureux
Souvent depuis je gémis en silence
Sur son tombeau quand j’ai prié le soir
J’implore dieu qui connaît ma souffrance
Afin qu’au ciel je puisse la revoir.

Une tombe dans les blés

Un jour de grand soleil, courant dans les épis
Deux fauvettes causaient tout près d’une croix noire
L’une disait « Vois-tu, c’est la pour leur pays
Que des braves sont morts, j’en veux conter l’histoire
J’étais bien jeune alors, à l’ombre des buissons
Qui bordent le chemin, sous l’aile d’une mère
Je regardais passer ces hommes et ces canons
Dont les clairons sonnaient l’hymne de la frontière.

Refrain

Dans un jour de revers, heureux celui qui tombe
Et pour toujours s’endort couché dans un sillon
Lorsque tu voleras autour de cette tombe
Fauvette, chante-lui ta plus douce chanson.

De tonnerre et d’éclairs tout l’horizon s’emplit
Tout tremblait sous le ciel, les oiseaux par volées
Loin de la poudre allaient chercher un autre nid
Ma mère et moi restions seules sous la feuillée
Lorsque pâle et souillé, superbe en reculant
Apparut devant nous se soutenant à peine
Un groupe de héros, ils dorment maintenant
Dans ces blés où longtemps lutta leur capitaine.

Au Refrain

Tous étaient blessés leur sang jeune et vermeil
Rougissait les épis et la mine hautaine
Ils tombaient un à un dans un champ de soleil
Sous le plomb qui frappait sur cette gerbe humaine
Quand il ne resta plus qu’un seul de ces vaillants
Il ouvrit sa blessure et, d’un geste farouche
Pour arracher sa poudre aux soldats allemands
Il noya dans son sang sa dernière cartouche.

Au Refrain

C’est là qu’ils sont couchés sur ce tertre désert
Où nul ne vient prier pour ces martyrs superbes
Et quand Avril renaît parmi les gazons verts
Il jette sa couronne en radieuses gerbes
La blanche marguerite et les coquelicots
Viennent dans les bleuets chaque printemps éclore
Et mêlant leurs couleurs au dessus des héros
Font pousser sur leurs tombes un linceul tricolore.

Au Refrain

Partez, Ernest

Partez Ernest, partez je vous en prie
Mon cœur est faible et craint votre pouvoir
Je vous aimais et par coquetterie
J’ai trop longtemps méconnu mon devoir
Seule avec vous je pouvais être heureuse
De mon bonheur vous vous montrez jaloux
Si vous m’aimez laissez-moi vertueuse
Eloignez-vous, Ernest, éloignez-vous.

Vous le savez, mon mari vient d’apprendre
Qu’il est trompé par moi qu’il aimait tant
Au Saint autel oh ! Laissez moi me rendre
Je dois mourir ou choisir un couvent
Votre âme Ernest ne sera plus jalouse
Car pour toujours je dois fuir mon époux
En l’écoutant c’est Dieu seul que j’épouse
Eloignez-vous, Ernest, éloignez-vous.

Deux mois après dans la Sainte Chapelle
Aux doux accords des cantiques pieux
Sœur Amélie aussi pâle que belle
Prenait le voile et prononçait des vœux
Le même jour étendu sur la pierre
Ernest mourait à la maison des fous
Il marmonnait en fermant la paupière
 « Eloignez-vous, de grâce, éloignez-vous ».

Rapelle-toi

Rappelle toi quand l’aurore craintive
Ouvre au soleil ton palais enchanté
Rappelle toi lorsque la nuit pensive
Passe en rêvant sur son voile argenté
A l’appel du plaisir lorsque ton sein palpite
Aux doux songes du soir lorsque l’ombre t’invite
Ecoute dans les bois murmurer une voix

Rappelle-toi, rappelle-toi.

2ème Couplet

Rappelle toi lorsque les destinées
M’auront de toi pour jamais séparé
Quand le chagrin, l’exil et les années
Auront brisé ce cœur désespéré
Songe à mon triste amour, songe à l’adieu suprême
L’absence ni le temps ne sont rien quand on aime
Tant que mon cœur battra toujours il te dira

Rappelle-toi, rappelle-toi.

3ème Couplet

Rappelle toi quand vous la froide terre
Mon cœur brisé pour jamais dormira
quand pour toujours la fleur solitaire
sur mon tombeau à jamais s’ouvrira
Je ne te verrai plus mais mon âme immortelle
Restera près de toi comme une sœur fidèle
Ecoute dans la nuit une voix qui gémit

Rappelle-toi, rappelle-toi.