Décidément j’aurais été plus rapide sur le terrain pour passer du Parc naturel régional de la forêt d’Orient à ce massif forestier de l'Argonne que je ne le fus ici même…
Les arbres que nous visiterons ce jour sont pour la plupart répertoriés sur un plan d’itinéraire-voiture distribué par les offices du tourisme. Nous en avons relevé certains sur la carte IGN 3013 E et d’autres figurent sur l’Atlas routier Michelin France édition 2005. Ils sont tous nommés et relativement bien connus par les autochtones qui ont pu nous aider dans nos recherches et que, tout en respectant leur anonymat, nous tenons à remercier ici chaleureusement, principalement ces deux jeunes vététistes rencontrés au pied du chêne Napoléon, l’un d’eux s’étant montré d’ailleurs comme un spécialiste de ce haut personnage de notre Histoire.
Forts de notre plan d’itinéraire voiture, nous allons tenter de remonter ce parcours du mieux possible en suivant les référencements qui nous ont été indiqués. C’est ainsi que nous commencerons dans le bois des Moutiers par :
(n° 8 sur notre plan, appelé d’ailleurs sur ce dernier "Chêne des Moutiers")
Il était âgé de 3 à 400 ans, avait une hauteur de 31 mètres pour une circonférence de 5,72 mètres. Malheureusement nous ne pouvons en parler qu’au passé car ce chêne fut balayé par une tempête en 1990 et outre la pancarte demeurée au bord de la route nous n’en avons vu que des restes de souche, l'arbre ayant été débité.
Suite à la parution de ce compte rendu de balade forestière, voici un complément qui me fut transmis par l'intermédiare de mon forum :
"Sur le Massif forestier d' Argonne , le Chêne des Hospices mérite mieux qu'un reste de racines !
J' ai retrouvé dans mes archives quelques photos prises après son déracinement du à un grand coup de vent en 1990 . J' avais fait poser mes deux fils pour montrer le diamètre de cet arbre . Je crois que celui ci était quand même déjà bien mûr ! Peut être ces photos vont elles vous intéresser ? ( Ce sont des photos scannées )
Je n' ai malheureusement pas de photos de ce chêne avant sa chute mais quelque chose me dit que ça ne devrait pas tarder. En tout cas je m' y attelle ! Sur sa fin tragique , je suis sûr que le gros coup de vent en est la cause."
Un grand MERCI au dénommé "sybeline" pour ce complément d'enquête.
Ne nous laissant pas abattre par cette déception nous partons sur la forêt de Lisle où nous trouvons :
(n° 7)
d’une hauteur de 36 mètres pour une circonférence de 3,60 mètres. Malheureusement ce chêne, pourtant donné comme « arbre remarquable » n’est nullement mis en valeur. Il est totalement enfoui, et sans aucun dégagement, à une trentaine de mètres sur la droite d’une route forestière et à 278 pas de la barrière d’accès à cette route.
Décidément nous manquons de chance mais pas encore d’ardeur et filons sur Villers en Argonne où nous attend :
(n° 6).
Il s’agit là d’un magnifique chêne en bordure de la D65 en direction de Ste Menehould. Ne cherchez pas, vous ne trouverez aucune indication ni dans le village, ni sur votre route mais ne manquerez pas de le remarquer sur une petite aire de repos avec une ou deux tables de piquenique … Il fut planté en 1638 et mesure aujourd’hui 27,80 m de hauteur et a une circonférence de 7,30 mètres… Ce jour il est habité par une fort dangereuse colonie de frelons qui y ont installé leur nid dans son creux à hauteur d’homme… nous laisserons, punaisé sur le tronc, une petite affiche pour prévenir du danger.
Nous poursuivons notre route vers la forêt de Chatrice où nous trouvons avec difficultés
(n° 5)
Ce chêne d’une hauteur de 29 mètres pour une circonférence de 2,85 mètres est en train de se mourir.
de même que :
(n° 4)
en forêt de Sainte Menehould, d’une hauteur de 24,40 mètres pour une circonférence de 3,80 mètres et il compterait plus de 280 années d’existence. Pour le trouver il vous faudra quelque peu marcher en forêt au « petit bonheur la chance »
Sur ces deux derniers chênes, nous obtiendrons quelques indications que nous fournira un jeune vététiste rencontré en ce dernier lieu et spécialiste de Napoléon :
La naissance du roi de Rome, le 20 mars 1811, fils de l'empereur Napoléon I° fut dans toute la France l'objet de fêtes imposantes.
Une vague de plantations d'arbres, orchestrée par la circulaire administrative n° 434 du 23 mars 1811 s'en suivit pour marquer cette réjouissance nationale et en commémorer le souvenir. Les habitants plantèrent en grande pompe un arbre ou des groupes d'arbres (chêne, ormeau, marronnier, peuplier...). On donna à ces arbres le nom de " roi de Rome " ou bien plus romantiquement "jardins du roi de Rome » ou « berceau du roi de Rome » en souvenir de l'événement dont ils rappelleraient la date aux populations futures.
Bien que la sécheresse de l'été 1811 décime de nombreux arbres napoléoniens, la Restauration en reçoit quelques-uns en héritage. Une généreuse circulaire n° 569 du 8 mai 1816 n'impose pas la destruction de ces souvenirs impériaux, elle se limite à prescrire l'enlèvement des emblèmes ou inscriptions politiques et séditieuses que certains peuvent porter.
Montant ensuite sur la Grange aux bois, juste aux portes de Ste Menehould nous découvrirons à l’entrée du parcours dit de santé :
(hors du parcours du plan et pourtant très curieux)
évidé (naturellement) permet de se glisser dedans. Pour certains il aurait près de 600 ans et aurait survécu à plusieurs incendies, notamment à cause des idiots qui le prennent pour une cheminée… Vieux de plus de 600 ans, il atteint aujourd’hui 22,50 mètres et enregistre une circonférence de 5 mètres.
Revenant sur notre parcours indiqué par notre plan nous partons en forêt des Hauts Batis chercher :
(n° 2)
magnifique arbre de 34 mètres de hauteur et de 5,63 mètres de circonférence, il est donné par l’Office National des Eaux et Forêt pour un volume environnant les 48 mètres cubes. Nous avons eu quelque difficulté à le trouver… mais il a valu le mal que nous nous en sommes donné.
Pour cela rendez-vous à la maison forestière de cette forêt et peu de temps avant de parvenir à cette maison vous trouverez sur votre droite une route forestière privée et barrée ; engagez-vous y à pied… assez loin sur cette route (ne désespérez pas), vous trouverez sur votre gauche une jolie allée de sapins toute droite et d’une cinquantaine de mètres… dans son axe vous découvrirez ce très joli chêne bien dégagé et mis en évidence…
Et si vous êtes suffisamment perspicace et silencieux peut-être aurez-vous la chance d’apercevoir quelques sympathiques chevreuils comme ceux que nous même avons découverts à la tombée de la nuit.
Il est tard et la nuit est presque tombée aussi décidons-nous de reprendre la route de notre bercail sans aller jusqu’à notre dernier chêne :
(n° 2)
situé à Clermont-en-Argonnes. Il serait âgé de plus de 250 ans, aurait été planté sous Louis XIV et aurait miraculeusement survécu aux bombardements.
Voici donc ce petit périple terminé… Je dois vous avouer avoir été quelque peu déçu car je n’ai pas vraiment trouvé ce que je recherchais. J’ai du mal à comprendre comment on peut qualifier d’arbres remarquables des arbres auxquels on n’apporte aucun respect. Comment peut-on distribuer des plans où la plupart n’existent même plus…
Je profiterai cependant de ce parcours pour vous parler en conclusion de la différence entre chêne pédonculé et chêne sessile car lorsqu’en France on parle du chêne, on pense avant tout aux chênes pédonculés et aux chênes sessiles.
Ces espèces donnent les plus grands chênes et sont les seules à être exploitées pour le bois d’œuvre. Le chêne pédonculé atteint des tailles record d’une cinquantaine de mètres et les chênes sessiles peuvent s’élever à près de 40 m de haut.
La longévité des chênes est légendaire. Les chênes vivent couramment jusqu’à 500 ans et dans les cas exceptionnels, ils peuvent dépasser un millier d’années. Toutefois, ils atteignent leur maturité beaucoup plus tôt. Les chênes pédonculés sont exploités entre 100 à 150 ans et le chêne sessile entre 150 et 200 ans.
Mais comment peut-on les reconnaître ?
Grâce au dessin crénelé de leurs feuilles, il est extrêmement facile de reconnaître les chênes parmi tous les autres arbres. Il est en revanche beaucoup plus difficile de distinguer les deux espèces entre elles. D’autant qu’elles s’hybrident fréquemment.
La différence la plus visible apparaît au niveau du gland. Le gland du chêne pédonculé, comme son nom l’indique, est attaché au rameau par une fine tige de 3 à 4 cm appelée pédoncule.
Le fruit du chêne sessile est en revanche dépourvu de pédoncule, (c’est d’ailleurs le sens du mot sessile). La cupule, dans laquelle est enchâssée le fruit, est directement fixée sur la branche.
Attention au piège, c’est exactement le contraire pour les feuilles.
Celles du chêne sessile présentent une tige beaucoup plus longue que celles du chêne pédonculé. Les botanistes préfèrent, pour les feuilles, employer le terme de pétioles.
En hiver, il est plus difficile de faire la différence, toutefois l’allure du chêne sessile est plus élancée. Son tronc est souvent très droit et sa ramure est bien équilibrée. L’allure du chêne pédonculé est plus massive et sa couronne, plus irrégulière, est constituée d’énormes branches. L’écorce du chêne sessile est d’un brun plus sombre que celle du chêne pédonculé. Elle présente aussi des lanières longitudinales plus longues. L’écorce du chêne pédonculé se caractérise par des crevasses plus marquées et des craquelures horizontales plus visibles.
On m’a signalé tout récemment un arbre particulier en forêt de Sainte Ménehould (capitale des pieds de cochon) dans ce massif forestier d'Argonne ; il s’agit d’un chêne fourchu qui a pris dans sa fourche un bouleau qui poussait à ses côtés en l’enserrant entre ses branches. Comment ? A quel moment ? Les spécialistes doivent avoir une petite idée de ce phénomène et peut-être pourront-ils nous en donner une quelconque explication. Le fait est qu’aujourd’hui on peut voir ce chêne fourchu avec 3 grosses branches dont une est un bouleau.
Cet arbre, (non classé "remarquable" de façon officielle mais que nous tenons à signaler ici à titre d'arbre tout à fait insolite) se situe à environ 800 mètres du Chemin des Grands Plains au bord de la Ligne de la Haute Chevauchée au lieu dit " Le Jouc ". Les 3 photos ci-dessous nous aideront sans doute à mieux percevoir ce phénomène de la nature.
Notons aussi que la vie de cet arbre ne tient que par un fil ; en effet un vaste projet de carrière est en cours (extraction de la gaise, roche réfractaire qui fait l’originalité géologique du massif argonnais, pour faire du ciment) et risque de dévaster une grande partie de notre magnifique Forêt d' Argonne, propriété de la ville.
Ce chêne-bouleau mesure environ 25 mètres de haut pour une circonférence de 1m90 prise à 1m30 du sol. Les deux branches du chêne qui forment la fourche font respectivement 1 m et 1m15 de circonférence, quant au bouleau son tronc fait 0m58 de pourtour.
n.b. (rajouté par le webmaster ) : au sujet de ce projet de carrière voir l’article : "On ne pourra pas dire : « on ne savait pas »", extrait du bulletin n°10 de l’Association "Biesme la Vallée" que vous trouverez en cliquant ici et un très grand MERCI à "sybeline" qui nous l'a fait deécouvrir... voir notre forum auquel vous aussi pouvez activement participer...