Traque extraordinaire

racontée à mon fils Dominique

par moi-même

Après le pont de Pont, ce 26 Février 2005

Mon cher grand garçon,

C'est d'une façon quelque peu originale que via Internet je vais t'écrire pour te narrer ma traque de mardi dernier et faire ainsi profiter d'autres internautes connus ou inconnus de ce récit fabuleux…

Cette journée avait été prévue de longue date avec les 2 JC, l'une étant déjà sur place depuis 3 jours, l'autre devant nous rejoindre le matin même… mais les circonstances météorologiques et les prévisions météo ont fait fuir la première et décourager la seconde… aussi me suis-je retrouvé seul lors de mon entrée en forêt, derrière le cimetière, vers 9 heures 45… C'est alors que tu m'as fortement manqué à toi… aussi vais-je te narrer presque minute par minute ce que fut cette splendide journée où j'ai tellement regretté ton absence… car j'aurai aimé que tu partages avec moi des moments de grand bonheur que tu as en ma compagnie aussi déjà tant recherché sans en avoir jamais goûté un tel plaisir…

10 :06 – Me voici à la lisière de « notre » forêt et je vais entrer plus profond sous le couvert des grands arbres, laissant derrière moi cette ancienne maison forestière… et prendre la direction de nos affûts où je sais déjà avoir le plus de chance de lever des animaux… Comme tu peux le voir, la neige a légèrement recouvert le sol et ma traque n’en sera que plus facilitée si jamais elle devait se produire… mais l’air environnant est vraiment glacial et le temps bien hivernal.

10 :28 – En traversant cette route que tu connais bien et que nous avons franchie ensemble il y a encore si peu de jours, je m’engage sur ce tout petit sentier à peine visible qui va me mener dans les environs immédiats de notre premier refuge.

10 :34 – Et là, très vite, premier émoi… juste devant moi, trois jolies biches qui se reposaient tranquillement à une dizaine de mètres de cet affût (imagine un instant la chance que nous aurions eu si l’autre jour, au cours de notre affûtage, elles étaient venues se coucher aussi près de nous !) se lèvent en m’entendant venir et se sauvent tranquillement et sans aucun effarouchement laissant juste sur le sol la trace de leur gîte.

10 :36 – Sans perdre de temps, je me mets aussitôt dans leurs traces et décide d’essayer de les suivre de mon mieux et d’abord de les retrouver car, en 2 minutes déjà, elles ont disparu à mes yeux alors que je n’ai eu que le temps de sortir mon appareil de photos.

10 :37 – Leurs traces sont toutes fraîches et bien tracées… mais de biches point encore pour l’instant… Elles se sont sauvées tout tranquillement cependant et ne devraient donc pas être trop loin mais tu te rappelles comme elles sont drôlement rusées et t’imagines bien qu’elles ont pu déjà me contourner.

10 :39 – Mais elles ne vont tout de même pas me « squiser » aussi facilement… on ne me « squise » pas ainsi car je ne suis pas né de la dernière « neige » et on ne me roule plus dans cette nature que je connais si bien surtout en laissant derrière soit d’aussi belles traces dans les feuilles gelées.

10 :52 – Eh, bien, tu me croiras ou ne me croiras pas mais de mes trois biches… plus que « couic »… elles ont bell et bien disparu… C’est à cet instant précis que mon regard est attiré par un mouvement un peu plus loin sous la haute futaie : un cerf, puis deux – trois – quatre… ils sont sept et se coulent doucement sous les bois… mais pas assez prudemment car je les ai entendus venir puis entre aperçus derrière les arbres… quant à eux, je ne pense pas qu’ils m’aient déjà vu… Alors changement d’objectif, je me mets en traque dans leur suite.

10 :58 – Ils m’ont devancé et très certainement se sont en hardés à croire les traces toutes fraîches qui, ici, marquent le sol… Ma grande harde, celle que je surveille depuis ce début du mois de janvier, était là il n’y a que quelques minutes, quelques secondes même peut-être. Elle est toujours aussi fournie ; aujourd’hui encore toute entière à nouveau présente,

11 :00 – à la vue des si nombreuses traces de gîte qu’elle a laissées là toutes fraîches derrière elle.


11 :06 – Mes sept cerfs, dont la trace d’arrivée est bien visible sur le sol, sont assurément maintenant venus buter sur elle et, prévenue de ma présence imminente, elle s’est levée et à filer… en témoigne cette large traînée qu’elle a laissée derrière elle telle un véritable « autoroute » à travers bois.

11 :17 – J’y trouve aussi d’autres marquages de leur passage m’indiquant la fraîcheur de ce dernier.

11 :20 – Il ne me reste plus qu’à suivre cette trace trop bien tracée… ma traque ne pourra qu’en être fructueuse.

11 :23 – La harde a cependant pris de l’avance sur moi car la voilà levée depuis déjà  plus de 25 minutes et elle m’a bien fait tourner en bourrique jusque là. Je la sens, elle est là, j’en suis sûr et toute proche maintenant. (photo 554)

11 :28 – Je poursuis toujours doucement sur sa trace… elle ne peut pas ne pas être toute proche, peut-être même me guette-t-elle… Et oui, elle est là, arrêtée, les têtes tournées vers moi mais se demandant ce qu’est cette ombre qui doucement s’est mis dans sa trace : aucune partie de mon corps n’est visible… j’ai ma casquette et ai rabattu sur mon visage son voile de camouflage… mes mains sont gantées, veste et pantalon de camouflage me moulent entièrement à notre environnement et mes bottes ont la couleur du sol… ; je me coule doucement d’arbre en arbre et sans bruit même pas celui de mes pas… Elle est là, enfin, face à moi… étonnée et curieuse

11 :30 – Je poursuis mon approche à pas feutrés, on me regarde… on m’épie…

11 :34 – on fuit.

11 :36 – Dès lors, ma traque va se poursuivre à vue durant quelques cinq minutes ; ma harde ne semble pas s’affolée, elle a juste pris un peu d’avance sur moi mais, pour l’instant, je la suis presque à vue parfois même elle semble m’attendre

11 :46 – Mais que se passe-t-il, brutalement elle a fuit en direction cette même route que tu connais bien et que j’ai traversé tout à l’heure… nous sommes revenus dans la région de nos affûts. Elle a de nouveau disparu, laissant toujours cette grande et large trace derrière elle comme pour m’indiquer le chemin et m’inviter à la suivre.

11 :50 – En effet, mon intuition a été bonne… elle a fuit de l’autre côté de la route et son passage est bien remarquable. Non, ce que tu vois là n’est pas un sentier, d’ailleurs tu le sais bien toi-même, il n’y a pas de sentier à cette hauteur de la route, c’est bien leur passage, regarde comme elles ont marqué le sol.

11 :52 – C’est à cette hauteur juste qu’elle vient de sauter… tu reconnais : au fond le poteau Hétéroclite, là où parfois (quand la flemme nous prend, nous laissons la voiture pour gagner quelques kilomètres à pied !

11 :52 – Regardes toutes ces traces sur le macadam elle est passée tout tranquillement, c’est-y pas beau cela bonhomme !

11 :54 – Nous revoici dans le bois… elle est passée par ici… repassera-t-elle par là ?

11 :56 – Tu vois elle n’a pas été loin… quelque peu éloignée de la route, elle s’est à nouveau stoppée et une fois de plus elle m’attend.

11 :57 – Alors je m’approche à nouveau elle ne semble pas s’en inquiéter outre mesure. Ca y est, elle est repartie, droit vers la route à nouveau. Va-t-elle une fois de plus s’y hasarder ?

 

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