Mercredi 26

Malgré nos deux heures de retard au départ de Fort de France, mais nous avons eu cinq grands jours de mer pour rattraper notre horaire, nous arrivons à l’heure à Funchal...

11 heures 36, tout le monde s’est amassé sur le pont pour enfin voir "terre"  avec vue sur la ville de Funchal et s’y imaginer un peu de civilisation en dehors de cette grosse coque de noix voguant sur l’océan... Alors que nous admirons les manœuvres de la vedette du pilote du port qui vient à vive allure à notre rencontre... nous croisons la goélette de Christoph Colomb (enfin sa réplique miniaturisée) qui emmène quelques touristes à son bord pour un petit tour en mer...

Vivement descendus sur le quai et pris en charge en bus, nous quittons rapidement le port

et gagnons le petit village de Monte perché au sommet d’une des collines surplombant Funchal, à 6 kms de l capitale, et où se trouve l’église de Nossa Senhora do Monte. C’est à l’intérieur de cette église qu’est inhumé Charles Ier empereur d’Autriche et roi de Hongrie, mort en exil sur cette île de l’Atlantique à l’âge de 34 ans. Son passage ici, qui ne dura cependant que cinq mois, avait à l’époque, suffisamment marqué les habitants pour qu’une foule de 30000 personnes viennent assister à ses funérailles un jour de printemps de l’année 1922. La foule qui se presse en dehors et à l’intérieur de l’église de même que la majorité des habitants de l’île le considérait comme un saint et l’évêque de Funchal dira de lui : «Aucune mission n’a jamais contribué aussi efficacement à raviver la foi de mon diocèse que l’exemple que l’empereur nous a donné dans sa maladie et dans sa mort» alors que la nuit précédant sa mort, Charles avait murmuré à sa femme: «J’ai toujours aspiré à reconnaître le plus clairement possible en toutes choses la volonté de Dieu et à la mettre à exécution d’une manière aussi parfaite que possible». Une aspiration qui avait été la sienne tous les jours de sa vie.

Nous nous dirigeons maintenant vers le départ du téléférique que nous allons emprunter pour nous rendre au Jardin Botanique… Nous remarquerons au passage de bien curieux traîneaux en osier servant de moyens de transports pour redescendre en centre ville (hilarité garantie !)… ces traîneaux, montés sur des skis de bois et dirigés par deux pilotes, dévalent en effet la pente sur un parcours de 4 kilomètres.

Le "vol" en téléférique durera environ 7 minutes et nous mènera dans un inoubliable voyage avec des vues privilégiées, non seulement sur la baie de Funchal, mais aussi du fleuve de Joao Gomes, un site d’une rare beauté exotique recouvert de mimosas en fleurs, constitué par une importante partie de la forêt Laurissilva.

A notre descente, nous pourrons nous rafraichir d’une délicieuse boisson locale accompagnée d’une tranche de pâtisserie. Puis ce sera le ravissement des Jardins Botaniques, une quinta privée appartenant à la famille Reid, où les conditions climatiques favorisent l’exubérance de la végétation. Ces Jardins Botaniques déploient des formes harmonieuses, des couleurs en contraste et plus de 2000 plantes, toutes étiquetées de leur nom scientifique et courant ainsi que de leur origine. On y trouve des jaracandas, wigandias, orchidées, cactées...

Notre excursion se poursuivra par le marché typique, situé au centre de Funchal, qui propose une infinie variété de fruits tropicaux, légumes, fleurs, poissons (malheureusement en raison de l’heure avancée de l’après-midi, le marché aux poissons est déjà fermé !) articles régionaux…

Puis après une rapide visite d’une usine de broderie où il nous est offert un petit verre de madère, nous regagnons le navire où, en attendant le repas du soir, mis en appétit par cette belle promenade, nous nous laissons tenter par quelques fruits sur la loggia de notre cabine… et tandis que l’Atlantica reprend sa route nous admirons le magnifique coucher de soleil qui une fois de plus s’offre à nos yeux.

Soirée au théâtre pour un non moins magnifique spectacle de danseurs et danseuses.

Un peu de géographie et d’histoire

L’île de Madère


L’île de l’éternel printemps, où l’été va passer l’hiver : une description peut-être romantique, voire romanesque mais très proche de la vérité. Un climat doux et reposant, des rythmes de vie absolument décontractés et sereins contribuent à faire de ce coin de paradis, qui avec quatre autres îles constitue une région autonome du Portugal, une véritable dimension parallèle à celle à laquelle nous sommes habitués dans nos villes. Madère veut dire "bois" en portugais : les premiers découvreurs de l’île pensèrent que c’était là le nom le plus approprié, car la première chose qu’ils virent ce furent des arbres gigantesques avec lesquels ils furent d’ailleurs obligés de réparer leur bateau.

L’île de Madère, dont Funchal est le chef-lieu, est plus proche des côtes africaines que de celles du Portugal et elle se trouve au centre de courants très favorables qui ont contribué à faire de toute la côte et de l’arrière-pays une gigantesque serre de fleurs multicolores et parfumées. Même le capitaine Cook, débarquant ici en 1768 au cours d’un de ses voyages, remarqua que la nature avait été particulièrement généreuse : bougainvilliers, mimosas, jacarandas forment le tapis coloré qui recouvre constamment chaque recoin de l’île où la température monte rarement,t au-dessus de 28° et descend rarement au-dessous de 15°.

Madère est depuis toujours un site touristique : il suffit de penser que les marins qui rentraient de longs voyages en Afrique et aux Indes, s’arrêtaient ici quelques temps pour se reposer du labeur de la traversée de l’océan, avant de rentrer chez eux et d’affronter la pluie, le brouillard et les climats tristes.

Parmi les premiers marchands qui commencèrent à fréquenter l’île, il faut rappeler Christophe Colomb qui, ayant épousé la fille du gouverneur de l’époque de l’île de Porto Santo, y vécut quelques temps.

Visiter Funchal à pied, en faisant du shopping, est très agréable, mais c’est des hauteurs qu’on a le meilleur point de vue sur l’île. Cabo Girao est un promontoire sur lequel les agriculteurs ont réussi à cultiver partout fleurs et vignobles, même sur le bord des ravins : ici les falaise tombent dans la mer avec un saut de plus de 600 mètres. Même les maisons du village de Camara de Lobos semblent vouloir défier les lois de la dynamique et de la gravité.

Très caractéristique est aussi le paysage de Sao Vicente d’où le panorama est vraiment extraordinaire. Un site suggestif est celui que l’on peut admirer à Torreiro da Luta, où se trouve le plus grand monument de madère, érigé après la façon de la Première Guerre mondiale et où est enseveli le dernier empereur austro-hongrois, Charles 1er, qui mourut sur l’île en 1922. De là on peut affronter la descente raide vers la côte dans les "cestinhos", une sorte de luge en forme de panier avec laquelle les habitants avaient l’habitude d’accélérer leurs excursions vers la mer en y transportant de tout : des fruits, de la viande séchées et… même des enfants.

Jeudi 27 - Vendredi 28 : en mer

Et nous voici pour deux nouvelles grandes journées de navigation en direction du détroit de Gibraltar tout d’abord, détroit que nous passerons aux environs de minuit le premier soir. Ensuite nous remonterons en Méditerranée le long de la côte méridionale espagnole jusqu’à Barcelone, notre prochaine escale…

Malheureusement je ne pourrai guère profiter de ce jeudi en mer car, ayant dû prendre un petit coup de froid soit à Madère, soit sur le pont du navire, j’ai une petite grippe avec de la fièvre et, mal en point, je vais rester bien au chaud au fond de ma couchette… Il en sera d’ailleurs de même pour ma journée de vendredi où je passerai le plus gros de mon temps sur le pont supérieur au bord de la piscine qui a été recouverte en raison d’une baisse sensible de la température… nous rentrons en Europe !!! Ah, malgré tes beaux couchers de soleil sur l’océan… qu’elles sont désormais lointaines ces Caraïbes enchanteresses !

Nous allons donc profiter de ces quelques heures de liberté et de repos pour nous remettre en tête quelques notions apprises sur le navire à travers les conférences qui s’y sont données. au cours de notre traversée…
  • La Constellation du Capricorne
Les origines de cette constellation sont assez confuses bien qu’on en trouve trace depuis l’époque des anciennes civilisations égyptiennes, babyloniennes ou grecques. Son histoire se réfère à la mythologie : l’histoire et l’enfance de Zeus (Jupiter). Il avait été prédit à Cronos, son père, qui régnait sur le monde, que l’un de ses fils le détrônerait. C’est pour cette raison que Cronos s’était assuré de tous les avaler au fur et à mesure de leur mise au monde. Rea, son épouse, imagina alors un stratagème afin de sauver son 6e fils, Zeus ; elle donna à manger à Cronos une pierre chaude emballée dans les langes de l’enfant, confiant ce dernier aux bons soins de deux nymphes. Durant toute cette période, l’enfant fut allaité par la chèvre Amaltea, immortalisée précisément dans la constellation de Capricorne en compagnie du nouveau-né.
  • Les zones climatiques
Ce sont les variations de la déclinaison du soleil qui déterminent les saisons. En fonction de ce constat, l’observateur constatera que la durée des rayons du soleil de jour comme de nuit varient ainsi que l’inclinaison moyenne des rayons solaires dont dépend la quantité de chaleur arrivant au sol sur une étendue bien définie.
C’est en fonction de cette déclinaison que la terre a été divisée en zones climatiques :
  • Les zones équatoriales qui sont comprises entre l’équateur et le parallèle 23°26’N pour l’hémisphère Nord et entre l’équateur et le parallèle 23°26’S pour l’hémisphère Sud, nommé respectivement Tropique du Cancer et du Capricorne, ces noms provenant des constellations dans lesquelles le soleil entre lorsqu’il est au zénith.
  • Les zones tempérées qui sont les zones comprises dans l’hémisphère Nord entre le Tropique du Cancer et le Cercle Polaire Arctique (66°34’N) et, dans l’hémisphère Sud, entre le Tropique du Capricorne et le Cercle Polaire Antarctique (66°34,S).
Lorsque nous nous trouvons dans l’une de ces deux zones tempérées, il y aura toujours un lever et un coucher de soleil, sauf, cas limite, si nous nous trouvons sur le cercle Polaire.
  • Le mille nautique
Au début des années 1600, le problème de l’exactitude de cette mesure se présenta aux marins lorsqu’il leur a fallu apprendre à utiliser de nouvelles cartes et à se familiariser avec la trigonométrie. A cette époque, on chercha à mesurer avec précision la longueur du degré de latitude et l’anglais Richard Norwood obtient une valeur proche de la réalité.

Compte tenu de ces mesures et d’une recherche encore plus exacte des dimensions de la Terre, on décida d’adopter un mille plus long par rapport à celui terrestre ou romain utilisé jusqu’alors. Ainsi, pour des mesures en mer, on l’a défini mille long et ce n’est qu’en 1730 qu’on le nomma mille nautique. Par la suite, en 1929, il fut adopté comme mille nautique international équivalent à 1852 mètres.

Pour l’histoire, au cours de cette croisière, nous aurons parcouru un total de 4.734 milles nautiques soit environ 8767 kms…
  • La boussole et le gyrocompas
Il y a environ 1000 ans déjà que la boussole a été inventée mais l’origine de la boussole magnétique reste incertaine bien que nous savons que Norsemen s’en servait au 11ème  siècle. C’est seulement en 1870 que Lord Kelvin inventa une boussole fiable destinée à la marine. L’utilisation de la boussole à liquide était couramment employée en 1906.

L’emploi du gyrocompas est devenu nécessaire sur les bateaux modernes ayant une coque d’acier ou de fer afin de remédier aux erreurs dérivant de ces matériaux… En 1852, Léon Foucault améliore le système de base du gyrocompas ; l’américain Elmer Sperry et l’allemand Kampf en développent un type différent, cette fois-ci électrique, dans les premières années du 20ème siècle.


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