Le Pourquoi du Comment ?


Je ne veux pas ici chercher à me justifier de mes attitudes mais seulement faire en sorte que ces dernières puissent être mieux comprises non seulement par ceux qui se posent des questions sur moi-même mais aussi par tous ceux qui pourraient s’en poser sur des gens qu’ils connaissent et qui réagissent très certainement tout comme moi-même je le fais encore actuellement...

Oui comment se fait-il en effet que je puisse parler
de balades en forêt, de sorties parfois en vélo, de quelques trajets en voiture
alors que je me refuse à pratiquement toute vie sociale actuelle ?

Je vais essayer de vous apporter les réponses à ces questions mais vous demande, dès à présent, de me pardonner les mots parfois un peu "crus" peut-être que je vais devoir employer pour bien expliquer ces choses (mais comment ne pas appeler un chat, un chat !) et recommande aux âmes sensibles de ne pas aller plus loin dans cette partie de mon écrit que j’ai voulu bien mettre totalement à part du reste afin qu’elles n’en soient aucunement choquées...


Il faut tout d’abord savoir que chaque cancer de la prostate représente un cas clinique à part et que personne ne réagit de la même façon... tout dépend en effet de l’impact plus ou moins important des conséquences post opératoires... et si tels ou tels ont mieux réagi que moi-même c’est tout simplement parce que leur cas fut différent du mien... car personne ne me fera croire que, en sortant de l’hôpital après une prostatectomie totale comme celle que j’ai subie il y a maintenant 187 jours très exactement, il a pu reprendre une activité normale même si les circonstances l’y ont obligé... ce n’est pas possible ou alors l'opération ne fut que bénigne...

Il n’en reste pas moins vrai que certains s’en tirent très certainement beaucoup mieux et beaucoup plus rapidement que je ne le fais moi-même. Je ne sais quelle fut la lourdeur de leur opération... ce que je sais simplement c’est que la mienne fut particulièrement lourde et dura près de 4 heures et demi obligeant le chirurgien, en pleine intervention, à ouvrir davantage que ce qu’il avait prévu à la première ouverture... mais ce n’est pas ici mon propos... et puis d’autres ont encore plus mal réagi que moi-même et certains même s’en sont allés plus tôt que prévu !.

Quoique cette intervention est de loin, j’en suis et en reste persuadé, la meilleure méthode pour lutter ou plutôt pour éradiquer totalement ce mal... elle n’est pas sans risque opératoire ni surtout sans conséquences post opératoires plus ou moins importantes selon les individus mais toujours bien réelles et persistantes. Ces conséquences sont de deux ordres : incontinence et impuissance.

Je vous parlerai tout d’abord ici de l’impuissance parce que je ne veux pas m’attarder sur ce sujet qui, à mon avis, est bénin... Quelle est son impuissance par rapport à la vie ? Peu de chose et je le pense très certainement... elle ne vous empêche pas de vivre totalement normalement et peut-être même vous aide-t-elle à revivre plus normalement qu’auparavant ainsi que l’expliquait récemment, dans une émission de télévision consacrée à ce problème, un homme d’une petite soixantaine d’années : « désormais au moins je reste fidèle à mon épouse, j’aurais trop peur de paraître ridicule si je devais tomber en panne avec une autre ». D’ailleurs autour de nous, et même si certains n’en sont pas totalement persuadés, n’existe-t-il pas des gens qui vivent par choix sans aucune sexualité...  je ne vis aujourd’hui que ce qui aurait bien pu être ma vie si j’avais persévéré dans ma vocation religieuse...... et je ne regrette ni ce passé, ni ce présent ni même cet avenir s’il devait persévérer !

Il est un sujet mille fois plus important, pour moi tout du moins et qui fait que, malgré tout...

Oui
je peux faire de belles balades en forêt,
quelques sorties en vélo et trajets en voiture
tout en me refusant malheureusement en même temps
à toute vie sociale pour le moment !

Il s’agit de mon incontinence urinaire qui, même si elle s’est fortement améliorée depuis mi mars, m’empêche encore aujourd’hui de vivre comme j’aimerai vivre à mon gré. Et croyez-moi, cette incontinence que l’on cache au plus profond de nous même est, pour chacun d’entre nous, un véritable calvaire que je ne voudrais en aucun cas souhaiter à mon ennemi si toutefois un jour je comptais un seul véritable ennemi... C’est d’elle que je vais vous parler maintenant avec des mots qui seront les miens car il n’y a pas d’autres mots pour s’en expliquer... vous saurez me le pardonner je l’espère...

Lorsque je suis sorti de l’hôpital, dix jours après mon opération, il m’a fallu, plusieurs jours durant, supporter une sonde reliée à une poche accrochée sur l’une de mes jambes et que je cachais sous mon canapé ou sous mon lit lorsque, allongé, je consentais tout à fait exceptionnellement à recevoir du monde à la maison... Cette sonde, pour une raison que je ne me suis jamais expliqué, fuyait en permanence et je vous assure que je souffrais beaucoup dans ma tête des conséquences qui s’en suivaient et auxquelles je me trouvais confronté et qui, malgré les apparences, jouaient énormément sur mon état moral... Le repli sur soi-même est alors le meilleur des remèdes pour conserver tout du moins en apparence l’amour et le respect de soi-même...

Cet état de choses a duré treize longs jours après ma sortie, treize jours où je ne me suis finalement senti bien (car tranquille) qu’allongé sur mon canapé ou même dans mon lit... Cet état de choses ne s’est pas arrangé non plus après l’enlèvement de cette maudite sonde hormis le fait de n’avoir plus à traîner derrière soi ou même tout simplement avec moi cette non moins maudite poche... Et les choses ont ainsi perduré de longs jours, de longues semaines, où là par contre je n’ai guère pu sortir comme l’envie m’en prenait trop souvent pour ne pas en souffrir.

Mais tout cela j’en ai déjà parlé et préfère en arriver tout de même à ce « pourquoi du comment » d’aujourd’hui.

Oui, je ressors en forêt tout comme je le faisais auparavant, sans plus de fatigue ou si peu d’ailleurs que je n’en ressentais autrefois... je fais même maintenant de longues randonnées : 23 kilomètres le 12 Mars, 34 km le 14, 23km le 22, 24 km hier... Je me force parfois et rentre bien fatigué  de ces longues marches... longues me direz-vous mais désormais vitales pour moi vous répondrai-je, car, si c’est souvent catastrophique durant ma sortie, c’est mieux le lendemain et encore mieux le surlendemain... Alors, après ces balades, je commence à revoir mon avenir sous de bien meilleurs auspices et je me mets à rêver à de nouveaux rayons de soleil dans ma vie à venir et je reconstruis des projets d’avenir qui me redonnent aussi du cœur au ventre.

Mais chacune de ces marches n’est pas une sinécure et ce n’est pas vraiment ce qu’il y a  de plus drôle !!!

Je suis en effet encore à près de 60/70% totalement incontinent... Cela veut dire que dès qu’aujourd’hui je fournis un effort (tousser tout simplement, monter un escalier, marcher...) mon sexe se met très rapidement à couler et je ne peux ni me retenir ni stopper l’écoulement... c’est tout juste parfois si je m’en rends compte.

Alors lorsque je pars et que je sais donc que je vais avoir à fournir un gros effort, je me harnache... et pour cela pas trente mille solutions...

Il existe dans le commerce, vendues soit en grande surface, soit en pharmacie, bien des protections soit du genre de celles portées parfois par la gente féminine mais alors là il nous en faut à nous des super-super de chez super... soit encore du genre coques absorbantes quoiqu’il est même préférable et recommandable d’ailleurs de ne pas porter l’une sans l’autre afin de vous assurer un maximum de sécurité. Mais ce n’est pas cela qui va résoudre totalement votre problème car ces protections n’ont qu’un temps... la coque se remplit ou bien le tissu absorbant se sature et très vite il vous faut les changer... C’est la solution qu’au tout début je m’étais habitué à adopter et que, mis à part dans la maison, j’ai du abandonner principalement pour mes marches en forêt car cette solution devenait une véritable ruine... jusqu’à 250 € par mois ! ! !

Sachez en effet que, malgré votre prise en charge par la Sécurité Sociale à 100%, aucune de ces protections ne vous est remboursée car considérée comme « confort »... Il faudrait donc juste vivre « nu » pour ne pas avoir de problème... ou alors porter des couches de bébé qui ne vous seront pas plus remboursées mais que vous pourrez peut-être garder en souvenir... c’est sans doute cela la seule méthode non confortable de prendre votre mal en patience...

Alors je me suis fabriqué des "poches maison" avec des packs de lait que je découpe et dont je glisse un exemplaire dans mes sous-vêtements... mais en route, quasiment tous les 2 kilomètres, il me faut trouver un endroit suffisamment discret pour à moitié me déculotter afin de pouvoir vider cette poche de fortune et la replacer ensuite... C’est la meilleure méthode que jusqu’ici j’ai trouvée et comme je bois en règle générale beaucoup de lait le matin je n’ai pas de problème quant à la matière première...

Mais bien entendu, cette coque devant rester en permanence verticale, impossible ni de vous baisser, ni de vous asseoir ni de vous allonger... Il faut de même constamment faire attention afin que d’une part votre "zigounette" ne fasse pas "trempette" et que d’autre part cette coque ne déborde pas... d’où l’utilité de s’arrêter plus souvent que pas assez...

Pour le vélo, beaucoup plus difficile à réaliser car en effort constant... alors seule solution la protection totale... couche culotte... totalement inconfortable et pas bon du tout pour le moral... Idem en voiture... aussi j’évite les longs parcours... et même si possible les parcours tout court... car problématique au moment de quitter la voiture !!!

Ben oui tout le problème est justement là...

Lorsque je me promène en forêt (idem en pleine nature... mais bien entendu pas en ville !) je peux m’arrêter où je veux et me surveiller comme je veux... à condition encore d’être seul ou accompagné uniquement de personnes en lesquelles j’ai une confiance absolue...

C’est donc pour tout le reste que problème se pose... car si, tout comme en forêt ou même en pleine nature cela est de l’ordre du possible comme chez soi... comment va-t-il en être dès que vous allez vous retrouver en société, en famille, chez des amis, au restaurant... Tout devient problématique...

Assis à votre bureau ou devant votre télévision (rarement cependant mis à part le soir) ou encore couché (mais encore plus rarement hormis la nuit) cela se passe sans trop de mal. Mais lorsque vous allez rester ainsi assis un certain temps, disons même un temps plus que certain, alors votre "tuyauterie" comprimée par votre position va laisser votre vessie se remplir normalement et, sitôt que vous allez devoir vous lever, cette dernière va se vider rapidement, parfois en quelques secondes... empêchant l’absorption de vos protections d’avoir le temps de se réaliser et ces protections vont déborder sans que vous n’y puissiez rien.

Il faut en effet bien comprendre tout d’abord que techniquement toutes ces protections absorbantes ne le sont que dans la mesure où vos pertes ne sont ni brutales ni excessives mais bien au contraire qu’elles vont s’écouler lentement... que ce soit en permanence ou occasionnellement...

Alors aussitôt que vous allez devoir vous lever il vous faudra agir plus ou moins vite et souvent pas le temps de monter un étage... et encore moins de "faire des kilomètres"... il vous faut ce qu’il faut sous la main... Le mieux reste encore d’être régulier et d’aller vous soulager tous les ¼ d’heure au début puis toutes les 1/2 heures et ainsi d’espacer le temps peu à peu...

Imaginez donc l’angoisse de l'accident, lorsque vous vous retrouvez en société dans laquelle  vous vivez en permanence... alors vous prenez votre mal en patience, vous restez chez vous, vous ne recevez plus personne, vous vous repliez sur vous-même et vous espérez simplement en de meilleurs jours... Tout devient en effet problématique !

Les courses, car vous ne pouvez pas rester ainsi dans une grande surface sans avoir besoin de vous rendre aux toilettes une ou deux fois laissant en plan votre chariot et bien souvent en étant dans l’obligation de sortir du magasin car les toilettes sont bien entendu en dehors des zones purement commerciales...

La messe (si vous êtes croyant et pratiquant),... je n’y retourne que depuis peu et encore à condition que la cérémonie ne dure pas trop longtemps... ainsi pas question pour l’instant d’assister à des offices comme une messe des Rameaux ou une Veillée Pascale... et lorsque vous demandez que l’on vous porte la communion à votre domicile (ce que j’avais fait au tout début) on vous oublie ou plutôt (ici à la paroisse de Pont Sainte Maxence) on vous le refuse !!!

Et je ne vous parle pas, pour cause, des longs trajets en voiture où le problème reste entier car vous ne pouvez vous arrêter sur le bord de la route comme vous le souhaiteriez et où vos longues périodes assises au volant vont vous contraindre là aussi à  vous protéger totalement par une couche (très désagréable en position assise !) et à vous changer chaque fois que nécessaire bien que le mieux soit encore parfois d’aller jusqu’au bout du trajet lorsque ce bout est votre seul et unique domicile.


Alors voila le Pourquoi du Comment mais cela ne va plus pour moi n’avoir qu’un temps et avec beaucoup de patience, de persévérance et d’attention je vais m’en sortir... même si pour l’instant il en est ainsi. Aussi, comme je n’y peux rien, il faut juste me comprendre et ne pas m’en tenir rigueur... et, si avec mes mots à moi, je n’ai réussi ni à vous convaincre ni à me faire comprendre... pardonnez-moi, car de toute les façons

DEMAIN SERA UN AUTRE JOUR...

un jour où,
en plus de mes balades en forêt, sorties en vélo, trajets en voiture,
je vous retrouverai dans une vie sociale tout à fait normale et sans plus aucune angoisse

un jour où alors
il me refera bon vivre.

Samedi 5 Janvier 2008

Malheureusement cet heureux jour n'est pas encore venu

et parfois je désespère un peu de le voir arriver